Je me souviens de ce jour où Birdemic 2 faisait la première page d'IMDb... J'en étais tout retourné, mais je doutais voir un jour ce film. Le premier était un nanar longuet et répétitif.
Mais récemment, Panic cinema projetait The room en présence de Tommy Wiseau, séance à laquelle je ne suis pas allé, chose que j'ai regretté ensuite. Alors quand ils ont annoncé lors de la dernière Nuit excentrique qu'ils allaient organiser un évènement similaire avec Birdemic 2, je ne voulais pas rater ça cette fois.
La première française (et dernière ?) de cette suite a quand même attiré nettement moins de monde : il restait encore des places au guichet 30mn avant la séance, alors que The room, dispo sur internet depuis des années, avait eu 3 séances, toutes complètes je crois.
En tout cas maintenant que j'ai vu comme était l'ambiance à Panic, je veux y aller plus souvent.
Au premier étage du cinéma, l'équipe du film, occupée à signer des posters à 10€, nous ont indiqué où se trouvaient les bières, gratuites.
A l'entrée de la salle, on nous a distribué des oiseaux en papier et des cintres (pour combattre les oiseaux, comme dans le premier film). En plus, le film était précédé d’une sélection de vidéos en lien avec les oiseaux : Killing birds, le film d'Hitchcock, un extrait de C'est arrivé près de chez vous, ...
Pour ce qui est du film en lui-même :
Ca débute par un générique de peut-être cinq minutes où l’on voit l’acteur principal marcher. Juste marcher. Face à la caméra, de dos, de loin, en panoramique, en travelling, devant le Grauman’s Chinese theater, dans des rues vides, … parfois la caméra tremble, mais c’est pas grave. Pendant ce temps, on dirait que toutes les personnes ayant travaillé sur ce film sont créditées.
Par la suite, quand on revoyait le héros marcher, ça provoquait quelques rires, comme si c’était un running gag.
Quand le film démarre vraiment, dès le premier cut, on se rend compte que le mixage et la prise de son sont horribles : on entend nettement la coupe de son entre chaque plan. Après on pourra aussi remarquer de temps en temps des différences de lumières terribles, on a des ombres qui recouvrent tout un plan tandis que dans un autre la lumière baigne un lieu, mais même en intérieur on dirait qu’il n’y a aucun étalonnage.
Comme dans Birdemic 1, la première partie du film est comme une observation de la vie de quelques individus. Et c’est toujours trop long, ça meuble, avec une séquence de danse incluant deux chansons entières.
Mais cette fois-ci, tous les personnages appartiennent au milieu du cinéma. On découvre comment on finance un film : dans un petit restaurant, on cause, on promet à un type de faire jouer son fils adoptif et sa copine dans son film, et on obtient un chèque de 100000$. Le film coûtera 1 million, mais le reste de l’argent sera donné par le producteur une fois qu’il aura vu les investisseurs… wait, à quoi servent les investisseurs si le producteur paye tout ?
James Nguyen semble en profiter pour critiquer le système Hollywoodien, en faveur du cinéma indépendant : quand on est indé, on peut faire le film qu’on veut, on a un contrôle créatif total ; quand on bosse pour des producteurs, ils nous demandent de retirer toute violence d’un film mais de rajouter des boobs. Bizarrement, dans Birdemic 2, il y a les deux !
Ca insiste pas mal sur la mise en abyme : lorsque les premiers oiseaux attaquent, un jeune asiatique interrompt la conversation de ses camarades inquiets pour proposer d’écrire un script à partir de ce qui se produit, et les autres proposent de réaliser, un autre de produire, etc. Quelqu’un renchérit en disant que ça pourrait devenir une franchise comme Saw ou Paranormal activity.
Que les fans se rassurent : Birdemic 2 poursuit la saga en gardant beaucoup de l’essence du premier film.
Beaucoup de personnages reviennent (de façon plus ou moins illogique), il y a toujours ce message lourdingue sur l’écologie et le réchauffement planétaire, et les mêmes CGI d’oiseaux pourris.
Si James Nguyen fait toujours référence à l’œuvre d’Hitcock, en faisant un petit caméo lui aussi, on trouve aussi des allusions à Jaws, et un peu de l’histoire de Jurassic park.
Aux oiseaux s’ajoutent une méduse, elle aussi en CGI, dans un plan très évocateur du film de requin de Spielberg. On ne sait pas trop pourquoi, car il n’y a plus aucune menace sous-marine par la suite, une fois la victime de la méduse emmenée dans une ambulance… en CGI elle aussi !
Mais ce qui rend cette suite originale, et bien mieux que le précédent épisode, c’est la présence d’hommes des cavernes ressuscités et de zombies !
On peut aussi s’amuser des détails qui tuent, ces petites preuves de l’incompétence effroyable de l’équipe du film : le fait que tous les visages des passants, les pubs et les plaques d’immatriculation sont floutés ; la récurrence exagérée et risible de la réplique "he’s dead" ; un champ-contrechamp sur un pont où l’on dirait que deux groupes de personnages se parlent en se tenant à 5m de distance ; un faux-raccord où d’un plan à l’autre aucun des personnages n’a la même marque de boisson sur la canette qu’ils ont en main ; le bord d’un décor qu’on voit à cause d’une contre-plongée ; un bout du micro-caméra qu'on voit en bord cadre.
Et bien plus encore !
Le film se conclut sur un plan d’une minute où des oiseaux font du surplace en battant des ailes devant les collines d’Hollywood.
Birdemic 2 est comme une grande bande-démo présentant toutes sortes d’incompétences diverses et plusieurs types de mauvais goût. Et après la séance, James Nguyen nous a annoncé qu’il y aurait un Birdemic 3 !
Si dans les vidéos que j’ai pu voir de Tommy Wiseau, celui-ci semble conscient du potentiel comique de The room, je ne sais pas ce qu’il en est avec James Nguyen.
Quand un spectateur, lors du Q&A après la séance, a comparé Birdemic 2 à The room, James Nguyen n’était pas très clair, mais m’a donné l’impression qu’il voulait faire la distinction entre son œuvre et celle de Wiseau. De toute façon, Nguyen était du genre à répondre à côté de la plaque ; quand j'ai demandé s’il comptait faire d’autres films inspirés d’Hitchcock, il a expliqué que comme le maître du suspense, il fait des films qui sont des "romantic thrillers", etc.
En tout cas, les acteurs et le producteur, eux, semblaient ne se faire aucune illusion sur Birdemic 2.
Un des acteurs a expliqué qu’il n’avait pas vu le 1 avant le tournage de cette suite, mais qu’il avait voulu signer immédiatement quand on lui a dit que le premier film était projeté dans le monde entier et qu’on en parlait dans de nombreux magazines prestigieux. Il eut une surprise en voyant le film, après la fin du tournage du 2.
Les deux acteurs principaux ont reproduit des mouvements de danse ridicules qu’ils faisaient dans le film. L’un d’eux, et le producteur, ont fait des roundhouse kick aussi.
A la sortie de la salle, James Nguyn nous a serré la main en nous remerciant. J’en ai profité pour lui demander de signer mon DVD de Les oiseaux. J’aime bien faire signer des trucs un peu insolites quand c’est possible. Pour m’assurer qu’il ne croie pas que c’était le DVD de Birdemic, j’ai répété "The birds", mais il ne semblait pas surpris.
C’est encore mieux que si Hitchcock avait signé, là j’ai un objet vraiment collector.