De la façon dont l'industrie du cinéma produisit des blockbusters et ce qui lui en coûta.
Beaucoup de choses ont été écrites et dites sur ce film. Il est donc difficile d'aller le voir sans quelques a priori.
Ce qui marque dès les premières secondes c'est le plan-séquence géant qui va occuper les yeux du spectateur durant les deux heures du métrage. Donnant une légèreté au film, les mouvements très délicats et calculés de caméra donnent à ce plan-séquence une place presque de narrateur dans l'histoire. Dans la technique, il est possible d'y voir une critique du blockbuster type "Marvel" (ou DC de toute façon c'est ma même chose). En effet, ici, le film prouve qu'il est possible de faire un film dynamique sans que ce soit sur-découpé au montage. Même si ce choix peut être discuté, le plan-séquence permet de faire respirer le film, l'histoire, les personnages...
La critique du blockbuster prend une place assez prépondérante dans le film. Dans les dialogues, une des premières répliques de Riggan Thompson à son agent est de pester sur le fait que Jeremy Renner soit un Avenger ce qui dans un sens le prive de son statut d'acteur.
Le statut d'acteur qui dans un film à gros moyen est bien résumé par la critique dans le film: ce ne sont pas des acteurs, ce sont des stars. Pour eux, ce sera très difficile de faire un retour gagnant et de prouver qu'ils méritent l'appellation de comédien.
Dans un sens, le personnage de Thompson est une critique de ce cinéma grand public. Le fait qu'il fantasme sa vie à voler et avoir des pouvoirs de super-héro, que la voix avec laquelle il discute est une voix rocailleuse outrancièrement grave à l'image d'un personnage créé par Bob Kane en 1939. Dans une mesure plus large, Sam la fille de Riggan (interprété par Emma Stone, la fille hein, par Riggan ça c'est Michael Keaton)est aussi un beau doigt d'honneur au "star system", transformée en junkie par le manque d'affection de la part de son père trop occupé à sauver la veuve et l'orphelin devant un fond vert. Tout dans ce film est là pour rappeler, comme disait Mel Brooks, "la sorcière déguisée en fée" qu'est l'industrie du cinéma. Je ne pourrai pas tout détailler dans cette critique, ce serait trop long, mais le plan-séquence encore une fois permet de rappeller que ce sont des humains qui jouent dans ces films, pas des dieux ni des super-héros.
Un dernière critique amusante du blockbuster est lorsque Riggan est contrait de faire le tour du théâtre pour pouvoir y entrer car il s'est trouvé "enfermé dehors", il passe devant une foule de touristes qui filment la star en slip se balader sur Broadway, certains en profite pour l'insulter. Ce qui est interessant c'est dans le fond du cadre. Lorsque Riggan avance, des affiches de spectacles et de magasins, posées les unes proches des autres forment la "phrase": "A triumph" "Disney" "forever". Peut être qu'ici je fais de la sur-interprétation, mais force est de constater qu' Iñarritu en profite pour afficher dans une des vitrines de New York qu'est Broadway une véritable claque dans la face des producteurs de divertissement.
C'est cela qu'est Birdman, un film que respire, qui semble parler comme si tous les personnages l'avaient vécu. Et pour cause puisqu'une bonne partie de casting (peut être l'intégralité) est passée par ce genre de film qu' Iñarritu critique. Témoin de la surélévation de ces artistes qui ont abandonné le navire de la célébrité à outrance pour être fiers de ce qu'ils font dans cet art qu'est le cinéma. Birdman par ses propos et ses porte-voix est la déclaration d'amour de la réalisation, du casting, du chef opérateur, des scénaristes(...) à leur art et à leur métier.