Birdman, tu es imparfait et versatile. Prétentieux et méprisant. Je t'aime dans tous tes défauts. L'espace de deux heures tu m'as fait vibrer, là-haut, au-dessus de cette marée humaine de cynisme et d'égoïsme. Tu as le courage de la naïveté, l'âpreté de l'ignorance. Tu m'as montré que l'émerveillement n'est pas une maladie infantile et honteuse que l'on soigne en vieillissant.
Birdman, tu es entier. Une seule séquence, pas de tricheries. Tu t'opposes au montage, à la manipulation, aux raccords et faux raccords, à l'opposé des blockbusters que tu dénonces. Le grand écart, le théâtre de Carver et le cinéma sfx de Hollywood. La vérité des planches contre le feu du Bois Sacré ?
Birdman, tu m'inspires. M'accepter tel que je suis. Même si c'est déraisonnable. Comme Reagan, enfin lui-même après avoir accepté ce qu'il était. Vivre avec passion. Comme Jake, qui s'accroche aux rêves des autres pour les vivre par procuration. Comme Sam, shootée à la coke, shootée aux tweet. Elle se nourrit de virtuel. Comme Mike, pour qui la vérité est sur scène, là où la vie n'est que décors, les émotions écrites, les sentiments joués. Comme...
Birdman, tu me parles. Tes personnages me rassurent dans leur humanité, dans cette capacité à garder une part d'enfance. Action ou vérité ? Dans cette écoute de nos désirs, dans l'expression de nos doutes. Même si les thèmes que tu abordes sont rabâchés, avec une certaine maladresse, ta sincérité est émouvante et entre en résonance avec l'ignorance. Il faut du détachement pour t'apprécier, un intellect au ralenti et un cœur plus réceptif pour t'aimer.
Birdman, tu enseignes les vertus de l'ignorance et les portes en étendard.
Birdman, je te dédie cette citation de Chamfort :
« Les raisonnables ont duré, les passionnés ont vécu. »
Et merci pour le voyage. Il est loin d'être achevé.