Bite the Dust par Teklow13
Le film se déroule dans un petit village paumé au fin fond de la Russie. Petite bourgade qui ne compte tout au plus que 8 maisons et où vivent ses habitants, pratiquement en autarcie, mais en aucun cas coupé du monde (la radio, la télé fonctionnent). Deux couples dont l’un avec deux enfants. Un des 2 maris passe ses journées à sculpter des bouts de bois, l’autre utilise son camion comme d’un bateau pour circuler sur l’eau. Une fille passionnée de cinéma qui s’est renfermée dans le souvenir de son défunt mari photographe. Elle organise des projections à ses voisins, hier c’était le secret de Brokeback Mountain, aujourd’hui ce sera le Silence de Lorna. Films qu’elle prend la peine de doubler elle-même pendant la projection. Un illuminé, casque d’aviateur vissé sur la caboche, passionné de science et d’électricité, qui écoute de la dance à fond et qui attire les éclairs avec ses ailes en aluminium pendant la foudre. Une vieille dame un brin irascible et qui semble gérer cette petite communauté. Et un vieil homme un peu fou, qui ne vit que pour sa vache adorée.
Un jour, la télé annonce la fin du monde, ça sera pour demain. Au début on pleure, mais très vite on décide d’organiser l’ultime pot de départ.
Les premières scènes peuvent laisser craindre le pire, quelque chose qui serait entre du mauvais Kusturica et du mauvais Scola tendance Affreux, sales et méchants. Quelque chose de criard, de foutraque, de crasseux et d’un peu fatiguant. Mais très vite le film s’installe. Il faut juste lui laisser le temps, et la réalisatrice le fait très bien, de poser son univers. De se familiariser avec le décor et surtout avec les personnages.
La scène clé, c’est bien sûr la scène du repas d’adieu. Ce n’est pas très grave de la dévoiler, mais durant cette scène, on attend l’apocalypse, alors on boit, on se dévoile, on prend les décisions que l’on a jamais osé prendre, on dit ce que l’on a jamais pu dire. Mais l’apocalypse ne viendra pas, alors il faut continuer à vivre, mais avec de nouvelles perspectives. Ici, on n’est pas dans une démarche à la Vinterberg, par exemple, le film n’est jamais cynique, et ce basculement qui aurait pu tendre vers l’explosion ne vient jamais comme acte de rupture. Il enclenche simplement une petite déviation.
C’est un film profondément humain, et dont la chaleur augmente au fur et à mesure qu’à l’extérieur le froid et le déluge s’abattent. Il y a une naïveté, ce n’est même pas ça, disons, un regard positif face à l’âme humaine qui est très touchant. La communauté plutôt que d’imploser va se renforcer, se consolider, les éléments vont s’aider les uns les autres.
Le film ne délaisse aucun personnage, tous sont portés à l’écran, tous sont filmés, tous existent. Ce qui est intéressant, c’est tous les détails du film, toutes les petites actions des personnages qui ouvrent plein de petites portes sur leur univers.
De tout ça se dégage un vrai charme. La cinéaste a réussi notamment à dévoiler ce petit monde, mais surtout à nous y faire habiter durant quelques temps et d’avoir la sensation de connaitre tout le voisinage, alors que, paradoxalement, eux ne se connaissaient jusqu’alors pas si bien que ça.