Presque trente ans après Soldaat van Oranje (1977), Verhoeven réalise Black Book un nouveau film sur la résistance aux Pays-Bas au temps de la seconde guerre mondiale . Après plusieurs années durant lesquelles il a réalisé des films américains, il revient tourner dans son pays pour ce film produit par plusieurs pays européens.
L’intrigue est fictive mais repose sur des faits réels : l’existence d’un carnet noir qui consignait le nom des traîtres et des collaborateurs aidant les nazis à capturer les résistants ainsi que les négociations entre le commandement allemand et la résistance pour limiter les effusions de sang.
Le personnage central de l’histoire est Rachel Stein, une juive qui a perdu toute sa famille dans une embuscade. Elle est sollicitée par la résistance pour espionner le QG allemand en séduisant l’un des officiers de la Gestapo. C’est à travers le regard de Rachel que nous voyons les événements. Après plusieurs figures de femmes prédatrices, Verhoeven nous offre ici le beau portrait d’une femme qui a tout perdu et qui a encore le courage de se battre pour son pays. Une femme intelligente, déterminée et capable de voir dans « l’ennemi » la part d’humanité qui peut exister. Si elle utilise son pouvoir de séduction, c’est pour sauver des vies en risquant la sienne. Elle est surtout une femme qui reste capable d’aimer.
Black Book déroule une histoire riche en rebondissements, aussi palpitante qu’un thriller. Verhoeven a clairement pris le parti ici de ne pas présenter des héros, mais de montrer qu’il n’y a eu aucun camp dont les membres aient été tous blancs. Il montre que l'antisémitisme existait au sein de la résistance, que des officiers allemands ont pu tenter de limiter le nombre des victimes, que des nazis convaincus ont pu s'en sortir à la Libération pour peu qu'ils luttent contre les communistes. Il montre aussi très bien combien il a été difficile au moment de la libération de faire la vérité entre ceux qui avaient trahi ou non, quand il y avait une réelle volonté de faire la vérité...
Encore un magnifique film de Verhoeven, un réalisateur qui m’a rarement déçue…