De la part du réalisateur de Robocop, Rotal Recall, Basic Instinct et Hollow man, on ne sera pas étonné de constater, que Black Book porte bien plus la marque d’un thriller d’espionnage, que d’un témoignage sur l’holocauste. Tout au long du film, on assiste à une telle accumulation de rebondissements, qu'il nous est permis de douter que cette histoire soit 100% authentique. Et pourtant, ce carnet noir (aka black book) contenant le nom des collaborateurs qui aidaient les Nazis à tuer des résistants pendant la seconde guerre mondiale à La Haye, a réellement existé. Black book est donc un film qui vérifie l'affirmation suivante, comme quoi "la vérité dépasse la fiction".
Avec Black Book, l’objectif avoué du réalisateur Paul Verhoeven est double, plaire à un plus large public possible et se réconcilier avec la critique. Des films comme Total Recall ou Robocop ont cartonné au box office et ont même gagné au fil des ans le statut si envié de films cultes, mais certains lui reprocheront toujours d'être un cinéaste vulgaire (le sexe et la violence) et de se complaire dans le genre films de science-fiction (un genre qui suscite le dédain de la critique). Les scènes de sexe et la violence exacerbée sont courants dans ses films et si vous ajoutez les flops majeurs (mais occasionnels) de Showgirls ou Hollow Man, on peut aisément comprendre pourquoi le travail de Paul Verhoeven n'est pas toujours pris au sérieux. Et pourtant, Black Book mérite notre plus grand respect.
Israël en 1956, un car de touristes s’arrête dans un kibboutz. L’une des passagères y reconnaît une enseignante, Rachel Stein (la sublime Carice van Houten), avec qui elle a vécu des moments terribles pendant la guerre. Alors que son amie s’en va, Rachel repense aux évènements qui se sont déroulés en 1944 en Hollande. Elle était alors une chanteuse de cabaret accomplie, mais également juive. Elle se cachait, attendant la fin de la guerre. Mais alors qu'elle essaie de fuir avec d’autres Juifs, le groupe est pris dans une embuscade et elle est la seule à en réchapper. Un peu plus tard, elle commence à travailler pour la résistance et infiltre la Gestapo, séduisant un officier de haut rang appelé Muntze (Sebastian Koch).
Black Book équivaut à un jeu du chat et de la souris, impliquant espionnage, contre-espionnage, opérations de propagande et réseaux de résistance. Infiltrée dans la Gestapo, Rachel (renommée entre-temps Ellis) est déchirée entre les horreurs infligées à ses amis et le double jeu qu'elle doit assumer pour tenter de les sauver. Peu à peu, une relation amoureuse et sincère se construit entre Rachel et Muntze. Anticipant la fin de la guerre, il devient clair que Muntze risque sa vie pour essayer de limiter le nombre des victimes et la souffrance des deux côtés, alors que certains combattants de la résistance se vendent aux nazis pour le profit. Comme Rachel, Muntze a dû surmonter de grandes pertes et leur humanité à tous les deux, est un pont qui les rapproche.
Rachel/Ellis est jouée par Carice van Houten, une actrice du cinéma néerlandais plus connue maintenant pour son rôle dans la série Game of Thrones. Elle brille de mille feux sous la caméra de Paul Verhoeven, qui voit en elle la nouvelle Sharon Stone. Il y a cette curieuse sensation de voir sous nos yeux, une star en devenir. Son personnage doit s’adapter à de nombreuses situations périlleuses, mais il y a une détermination sous-jacente et une capacité à s'adapter à toutes les situations, qui font que de tels traits de caractère semblent être innés (et non scénarisés) chez elle. On partage son combat émotionnel et on admire son courage pour s'opposer à la Gestapo, qui pourtant est loin d'être stupide. Le film vaut la peine d’être vu, rien que pour sa performance magistrale. Mention spéciale aussi à l'acteur allemand Sebastian Koch (aka Georg Dreyman dans La Vie des autres), toujours aussi charismatique.
Black Book est un cas curieux. D'une part, il se présente comme un film quasi documentaire, basé sur des faits et des personnages réels. D'autre part, il accumule les faits de bravoure et les rebondissements qui le rapprocheraient presque d'un film à la James Bond (des héros plus grands que nature). Les scènes d'évasions sont haletantes, les scènes de sexe sont torrides et le suspense est maintenu jusqu'au bout. Le style de Paul Verhoeven ne peut pas plaire à tout le monde, mais avec Black Book et son retour au pays, il montre qu'il n'a rien perdu de son talent ni de son mordant.