Black Swan, n'est pas un film sur la danse. C'est un film qui essaie de montrer comment chacun de nous est proche de la folie, et comment on est à deux doigts d'y sombrer à chaque fois que l'on doit se surpasser.
Black Swan peut sembler manichéen, puisque le film part du principe que l'on ne peut incarner à la fois le bien et le mal. On est soit l'un, soit l'autre. On assiste donc à l'évolution de Nina, choisie pour incarner le rôle principal du Lac des Cygnes. Nina passe d'un extrême à l'autre au cours du film : alors qu'au début, elle ne pouvait incarner que le cygne blanc, synonyme de pureté et d'innocence, elle s'en trouve bien incapable à la fin (cf. la chute), se transformant littéralement en cygne noir.
Blak Swan, c'est l'histoire d'une fille que l'on considère à la fois comme une enfant et comme une adulte. Nina accepte d'être une enfant tant qu'elle croit encore incarner le cygne blanc (cf. les peluches, les vêtements qu'elle porte, la mère qui lui coupe les ongles et la cajole), mais dès qu'elle se transforme en en black swan, elle s'oblige à grandir (cf. les fantasmes, la drogue, l'alcool, les peluches dans le vide ordure).
Black Swan repose sur une idée délicieusement surannée : la perfection ne peut être atteinte que par l'autodestruction. Ainsi, Nina se transforme peu à peu en Beth, au point de se confondre avec elle. Ce n'est qu'en se faisant du mal, qu'en se griffant et se poignardant que Nina parvient à jouer la facette sombre de son rôle. Le film laisse entrevoir deux conceptions différentes, voire opposées, de la perfection. Selon la première, perfection rime avec travail et persévérance. Mais Nina semble peu à peu réaliser que la perfection ne peut s'acquérir qu'en lâchant prise et en acceptant de s'interroger sur son identité même.
J'ai trouvé dommage que Darren Aronofsky n'arrive pas à se défaire de ce cliché qui lie perfection et autodestruction. C'est certainement une idée qui a fait long feu au XIXème siècle, avec la notion de "poète maudit", mais elle semble un peu dépassée à présent.
Au-delà de ce parti pris, le film est souvent d'une beauté époustouflante et sans fausse note et les acteurs (Natalie Portman, Winona Ryder, Vincent Cassel, etc.) sont formidables. On ne voit pas le temps passer, ou plutôt si, on ne le voit que trop bien à travers la transformation de Nina...