La puissance immersive des films d’horreur d’Andrew Traucki, marque de fabrique d’un The Reef (2010) ou d’un Black Water premier du nom (2007), tient pour l’essentiel à une prise en compte du milieu naturel investi, à savoir la pleine mer ou les bayous d’Australie, non comme simple décor devant lequel s’agitent des fantoches destinés à souffrir, mais comme des environnements dotés de leurs propres caractéristiques, âpres et brutaux, auxquels se heurtent des individus peu regardants. Ses films représentent l’homme raccordé à sa petitesse et à sa fragilité, la pleine mer ou la caverne fonctionnant à la manière d’un théâtre de la cruauté qui permet aux non-dits, aux rancœurs et aux angoisses de s’exprimer.
Le crocodile, dans Black Water: Abyss, apparaît telle une entité vengeresse, un démon venu punir les amants qui ont péché pour laisser vivre à terme les deux rivales réconciliées, pardonnées. Le réalisateur réussit à rendre ses absences aussi terrifiantes que ses attaques, la mise en scène qu’il compose mêle avec brio la maîtrise des effets horrifiques avec une parcimonie de leur emploi : les retournements de situation, l’enlisement progressif des personnages dans une grotte souterraine à valeur métaphorique, la menace constante exercée par le prédateur, tout cela s’avère savamment dosé et nous tient en haleine du début à la fin. D’excellents effets visuels achèvent de faire de cette suite une très agréable surprise, certes stéréotypée, mais qui divertit sans faiblir.