Avec Guillermo Del Toro, c'est toujours la même chose. Oeuvres de commande ou plus personnelles, comme Le Labyrinthe de Pan, profondément ancrés dans la réalité ou bien tutoyant la poésie la plus pure, ses films me procurent à chaque fois le même plaisir, la même fascination, la même envie dévorante.


Et même si le film n'était finalement qu'un passage obligé vers ses rêves d'adaptation de Hellboy, avec Blade II, le bouillant et expansif mexicain exulte, s'amuse et étale toute sa gourmandise. Comme un enfant qu'on a lâché dans un magasin de bonbons et qui ne sait plus ou donner de la tête.


Guillermo Del Toro transforme Blade en un véritable samouraï urbain, avec tout ce que l'image du personnage charrie de rituels quasi religieux autour de sa lame, de son sérum, de son dojo. Un héros sûr de lui qui semble au sommet de son art et de ses capacités. Qui virevolte sous l'oeil d'une caméra libre qui l'accompagne de sa fluidité et de son sens du spectaculaire en de nombreuses occasions.


Blade II incarne la générosité légendaire du réalisateur mexicain, avec ses très nombreuses séquences d'action toujours originales, la variété de ses styles de combat, allant du sabre au catch et au MMA. C'est aussi cet aspect jouissif dans le fantastique, aux confins du film d'horreur, la représentation de ses monstres fascinants fortement connotés, tout aussi magnifiques qu'horribles , ou cette violence débridée et frontale qui répugne autant qu'elle réjouit.


Blade II, c'est une tornade visuelle constante et inventive où les plans sont tour à tour baignés de lumières bleues acier, associés aux vampires et à la menace, ou d'ambre chaude, essentiellement réservée à Blade et à la jolie Nyssa. Le rouge fait irruption dans le cadre par flash afin de souligner l'opposition, au détour d'une chambre, ou de manière plus subtile, sur les ongles d'une femme vampire.


Difficile dès lors d'envisager le film comme une simple commande, tant il fait ressentir la personnalité cinématographique de Del Toro, sa boulimie d'images virtuoses, sa volonté de subvertir l'exercice en tournant la caméra du côté de ces monstres qu'il affectionne tant, ses envies d'expérimentation, ses références multiples et disparates allant des 12 Salopards à Trinita. L'ombre d' Alien(s) plane aussi, le temps d'une scène de dissection ou d'un shoot them up tendu dans des égouts aux allures de catacombes. Le réalisateur y intègre aussi, et surtout, la puissance de ses univers et sa thématique récurrente des rapports difficiles au père, via cette famille vampire dysfonctionnelle, du lien entre l'élève et le senseï.


Blade II est aussi l'occasion de retrouver un Wesley Snipes suintant le cool, le félin, le décontracté, dans un rôle pour lequel il est né. Un des derniers magnifiant son aura, puisqu'il faudra attendre ensuite L'Elite de Brooklyn pour le voir aussi à son avantage. Le film est aussi l'occasion de rester sur le cul face à un Blood Pack débordant de charisme, Ron Perlman en tête, avec son personnage de suprémaciste hissé au rang d'antagoniste du Day Walker.


Le DVD de mon édition collector doit être bien usé, à force. A chaque visionnage, je remarque une petite chose nouvelle, comme par exemple la fascination de Del Toro pour l'anatomie ou les bocaux remplis de formol où sont conservées les choses les plus dégoutantes. Ou ce personnage de Nomak, méchant et protagoniste d'une tragédie familiale, qui n'est pas sans rappeler le Nuada de Hellboy II : Les Légions d'Or Maudites.


Et à chaque fois, dans la dernière ligne droite, la même émotion monte, quand les cendres incandescentes s'envolent, à la lumière naissante du levant. Dans un romantique paroxystique parachevant une oeuvre tout aussi sauvage qu'exceptionnelle.


Te quiero Guillermo !


Behind_the_Mask, la lame entre les crocs.

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le 29 févr. 2016

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Behind_the_Mask

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