Cette question du temps est essentielle dans Blade Runner. Un flic, un blade runner, est à la recherche de replicants, des androïdes parfaits, en vue de les éliminer. Commençons pas l’ambiance. Tout ici est moite et humide, il pleut d’ailleurs sans discontinuer pendant tout le film. Le jour, on sait pas ce que c’est. Où se trouve-t-on ? Bonne question. Dans une sorte de mégapole cosmopolite. Quand ? Dans le futur, en 2019. Tous ces éléments mis ensemble participent au sentiment de désorientation. On sait ni où on est ni vraiment quand. Dès lors, comme savoir où nous allons ? Quintessence de l’esthétique des années 1980, à l’image des films de Michael Mann, Blade Runner nous présente des lumières flashy et du contraste à la pelle. Le jeu sur les matières et les transparences vaut le détour. Les thématiques abordées sont très fortes elles aussi. Le film évoque la relation entre créature et créateur, la recherche de la paternité, la question de l’origine et du but de la vie, l’héritage qu’on laisse derrière soi, la définition de l’humanité par rapport à la transhumanité ou à l’objet animé. Au fond, ces personnages « méchants » sont très touchants dans leur lutte pour survivre à leur date de péremption. Harrison Ford campe parfaitement ce flic de polar des 40’s, célibataire violent qui ne crache pas sur la boisson et qui se laisse séduire par la vampe vénéneuse. Le reste de la distribution est raccord, en particulier un Rutger Hauer majestueux, comme à son habitude. Le petit regret sera probablement que les thématiques, aussi fortes soient-elles, ne sont pas davantage développées. Un tout petit bémol au regard de l’immensité des images qui défilent devant nos yeux. Dernière chose, la version restaurée de 2015 est proprement sublime et donne cette impression que le film est sorti hier (à ceci près que ça fait bien longtemps que les films de Ridley Scott ne sont plus de cette qualité). La musique de Vangelis a pris de son côté un coup de vieux mais elle participe au charme du film, c’est certain.