Los Angeles, 2049. L’agent K (Ryan Gosling) est un blade runner chargé de mettre hors-service les réplicants d’un ancien modèle, datant d’avant le blackout, événement survenu en 2022 qui a vu s’effacer toutes les données informatiques à Los Angeles. Mais une enquête le mène à la découverte des traces d’une ancienne réplicante, décédée en donnant naissance à un bébé. La supérieure de l’agent K (Robin Wright) le charge alors de découvrir ce qu’il est advenu du bébé et d’en effacer toutes traces…


Proposer une suite au chef-d’œuvre de science-fiction et film culte de Ridley Scott ? L’idée elle-même relève de l’hérésie cinématographique pure et simple ! Pourtant, la présence de Denis Villeneuve à la réalisation a commencé à avoir raison des doutes omniprésents, et le scepticisme a même laissé place à l’attente lorsqu’on a su que Roger Deakins, immense directeur de la photographie devant l’Eternel, était lié au projet. Car de fait, une bonne part du génie de Blade Runner reposait sur son aspect visuel révolutionnaire pour l’époque, et chercher à l’imiter alors qu’en 2017, les effets spéciaux ultra-réalistes sont devenus courants, semblait proche de l’inconscience.
Or, c’est bien par ses innovations visuelles hallucinantes que Blade Runner 2049 frappe de prime abord. Osons le dire, c’est une claque esthétique comme on n’en avait plus eu depuis très longtemps que Denis Villeneuve nous envoie en pleine figure avec le présent film. L’alliance des décors monumentaux de Dennis Gassner et de la photographie parfaite en tous points de Roger Deakins contribue beaucoup à la réussite du film, tant chaque plan s’imprime dans le cerveau d’un spectateur subjugué et décontenancé par cette œuvre qui lui montre que, contrairement à ce qu’il croyait, il n’a pas encore tout vu en termes de cinéma. Mais la mise en scène ne serait rien sans un casting impeccable pour le valoriser, et c’est peu dire que le casting du film de Villeneuve est d'une perfection qui frôle l'absolu, particulièrement le duo Ryan Gosling/Harrison Ford, qui fonctionne à merveille, sans jamais qu’un des deux acteurs empiète sur le territoire de l’autre. On ne peut pas non plus ne pas mentionner Jared Leto, qui livre ici une prestation époustouflante, et qui suscite d’ailleurs un des (rares) regrets du film : l’acteur et son personnage étant tous deux géniaux, pourquoi ne pas lui avoir donné un rôle et un temps de présence plus importants ?
Au niveau du scénario, comme dans le film original de Ridley Scott, il tiendrait presque sur un timbre-poste, tant l’enquête apparaît comme un prétexte à renouveler – sans jamais répéter bêtement – le questionnement du premier film sur l’intelligence artificielle, sur le rapport de l’homme à la technologie (si les robots sont capables d'enfanter et de vivre comme l'homme, ne vont-ils pas s'émanciper et se rebeller contre l'homme ?), mais aussi à la réalité et au temps qui passe et sur la création (des thèmes qui trouvent tous leur aboutissement dans l'excellent personnage joué par Ana de Armas), le tout saupoudré de parallèles bibliques intelligents, quoique légèrement moins maîtrisés que dans le film originel.
Il faut toutefois le reconnaître, cette interrogation captivante se dissout parfois dans les méandres d’un film trop long, ses 2h45 se sentant (parfois) passer malgré la qualité plastique époustouflante de l’ensemble. Mais c’est finalement cette dernière qui l’emporte, faisant passer les réticences au second plan, afin de happer son spectateur dans un voyage hypnotique plein de poésie et de puissance, véritable odyssée métaphysique et contemplative certes non dénuée de scories, mais qui réussit à se montrer incroyablement digne du film dans la lignée duquel il se place, moins effrontément qu’il n’y paraît. Et en sortant de ce film, on ressent bel et bien ce sentiment que l’on aimerait ressentir plus souvent aujourd’hui, mais qui se fait malheureusement rarissime dans les salles de cinéma actuelles : celui d’avoir contemplé un monument, certes pas toujours parfait, mais un film qui, espérons-le, marquera durablement l’histoire du cinéma, à l’image de son aîné.

Tonto
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le 5 oct. 2017

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Tonto

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