L'oeil. Cette symbolique du miroir de l'âme revient nous questionner 35 années plus tard. En 1982 sortait Blade Runner premier du nom, un film qui a aussitôt acquis le statut d'oeuvre culte et qui a influencé durablement le monde de la science-fiction. Nous avons tous hurlé au scandale en apprenant qu'une suite était en préparation. Nous avions tort. Le Roi est mort, vive le Prince!


Souvenez-vous du plan d'introduction de Blade Runner; ébloui par le spectacle offert par Ridley Scott on pouvait presque éteindre sa T.V et considérer le film comme subjuguant sans aller plus loin. Villeneuve nous offre un plan d'introduction tout aussi beau, sublimé par cet arbre mort au milieu de ces contrées désertiques. Un monde mourant sans aucun remède possible: c'est le constat qu'il nous est proposé dès le début. La Terre est morte, les espoirs d'un meilleurs futur envolés. C'est ce spleen permanent qui va marché à nos côté tout au long du film. Il n'y a aucune chance de rédemption: le monde est ainsi et la quête du Blade runner bien qu'en apparence vaine va se montrer indispensable.


Le premier opus jouait sur une ambiguïté délectable: Deckard était-il un réplicant ou non? Ici la question n'est pas posé car K (Ryan Gosling) est un répliquant officiant en tant que Blade runner: il doit donc "retirer" ses propres semblables. Ce paradoxe permet d'inverser les rôles: tandis que l'on observait les répliquants se questionner eux-même durant l'enquête de Deckard, on a affaire ici à un phénomène d'introspection. K connait sa nature, son but mais il cherche un sens à sa propre vie et c'est de par ses actes et le regard intense de R. Gosling que son humanité se dévoile. Il n'y a plus de différences désormais entre humains et répliquants, ces derniers étant devenus infiniment meilleurs que leurs créateurs. L'oeil, toujours cet oeil omniprésent et les multiples larmes qui en couleront à travers cet odyssée sans retour le prouve.


En 2029 Deckard menait une enquête policière. Blade Runner c'est avant tout un film policier futuriste et on avait très peur que cela tourne à de la science-fiction bagarreuse qui pullule sur les toiles aujourd'hui. Que nenni. Dans le (trop) strict respect de son aîné, Blade Runner 2049 suit les codes du film noir avec ses personnages de l'ombre, ses dialogues minimalistes, son univers art déco... Les références à l'oeuvre de 1982 sont multiples; s'y ajoutent de nouveau thèmes comme l'écologie et le rapport des entités artificielles entre elles. K suit les miettes de pain jusqu'à la rencontre tant attendu avec Deckard, Mr Harrson Ford. Les deux protagonistes se complètent à merveille et il se dévoile un scénario plutôt inattendu mais cohérent dans son arc narratif. Les thèmes de l'enfance et de la procréation sont majeurs, de nombreuses question entourant le passé de K poussant le spectateur à vouloir en savoir toujours plus. On assiste à de la SF poussée à son paroxysme, peut-être trop pour certains.


Il est insolent de mettre en scène aussi brillamment. Denis Villeneuve est un très grand désormais. Chaque plan est ciselé à la perfection, chaque scène est élégante, presque mystique. On passe du contemplatif au narratif avec aisance et il y a sans nul doutes quelques un des plus beaux plans larges de ces 10 dernières années. Un rythme lent, très lent nous est imposé, c'est la patte Villeneuve. Le visuel prends le pas sur les protagonistes, parfois trop. Sans tomber dans la vanité, le réalisateur canadien gave un peu trop le spectateur de séquences méditatives, de plans trop étendus. Il faut savoir couper parfois. On aurait aimé un peu plus de bravoure, éventuellement un brin d'action en plus car vers la fin le film nous paraît longuet. Les intentions du "grand méchant" (J**ared Leto**) sont peu claires et n'aident pas à briser une certaine monotonie.
La fin. Parlons-en. Elle est ratée et gâche de façon probante le propos du film. Je ne voudrais pas dévoiler les pourquoi du comment mais à mon sens il s'agit là avant tout d'un prétexte à un troisième opus. Ce qui ne devait pas être nécessaire...


Blade Runner 2049 est un superbe film de science-fiction, une oeuvre hallucinante de par nos jours. On se sentira longtemps hanté par son pessimisme, sa froideur et son émerveillement graphique. Pas exempt de tous reproches, bien trop long, il en reste un film sorti des années 80 pour nous transporté dans un futur qui pourrait être le notre. Un ange tombé du ciel...

Wynner92

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9

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