Film d'épidémie mais qui change agréablement des histoires de zombies ou de virus mortel, Blindness est une puissante parabole sur les temps de crise ou de guerre, à la réalisation et l'interprétation impeccables et qui prend vraiment aux tripes par moments, qu'il s'agisse de moments d'horreurs ou de moments d'espoir.
Après les gens attachés au réalisme (? pour un film apocalyptique ?) peuvent trouver quelques reproches à lui faire sur le déroulement de l'histoire, mais la manière dont les populations malades se retrouvent abandonnées à elles mêmes par des biens portants ne songeant qu'à éviter la contagion, et où les plus sauvages et avides se mettent à faire leur loi, exploitant le désespoir ambiant, est si criant de vérité (in)humaine qu'on lui pardonnera aisément les quelques facilités scénaristiques employées pour permettre au film d'aller au bout de son propos (d'autant que quand on y réfléchit à peu près tout ce qui semble clocher au premier abord trouve une explication - au point que je me demande comment certains critiques ici arrivent à en faire un tel plat).
Autre chose que j'aime beaucoup dans ce film, tout en allant au bout de la noirceur de son thème, il ne se résume pas à montrer l'humanité retournant en barbarie avec pour seul message un nihiliste "pour survivre il faut s'endurcir" comme beaucoup d’œuvres du genre. A l'image des survivants qui ne restent pas prisonniers du huis clos où se déroule la moitié du film, il ouvre des portes vers une sortie de l'horreur à travers la solidarité humaine. Plus que le début de l'épidémie plutôt convenu, l'indifférence des autorités tournant en trahison, les moments de cruauté, les scènes de dévastation, ou la toute fin, c'est l'image de la colonne d'aveugles avançant à la queue le leu maladroitement dans les ruines, accrochés les uns aux autres pour ne pas se perdre, que je retiendrai de ce film.