Une petite perle de sensibilité perdue dans la poussière et le sang.

Le nouveau film de Jean-François Richet (Mesrine) a su faire une bonne impression cette année au festival de Cannes où il était présenté et il nous tardait vraiment de pouvoir découvrir ce nouveau long-métrage ‘french touch’ sans prétention. Ajoutant une nouvelle cartouche à la carrière de Mel Gibson que l’on n’avait plus vu briller de la sorte depuis longtemps, l’acteur rempile pour un rôle de père de famille au lourd passif et s’embarque aux côtés d’Erin Moriarty, bluffante, dans un road-movie père/fille auquel Richet donne un éclat, une intelligence insoupçonnée et une sensibilité touchante. Dès l’ouverture, le métrage ne ment pas sur ses intentions, en plus de proposer un drame familial sanglant, Richet joue la même carte qu’Andrew Dominik avec Cogan: Killing Them Softly en glissant de subtiles et acides piques critiques sur les dérives de la société capitaliste américaine et le ridicule de la vente libre d’armes à feu. Link (Mel Gibson) est une épave, aussi rouillée et poussiéreuse que la caravane où il vit de son salon de tatouages et de réunions d’alcooliques anonymes, essayant de remettre sa petite sur le droit chemin malgré le lot d’emmerdes que le retour de l’enfant aimé apporte à ce vieux rangé. Loin d’être un énième thriller d’action débile comme le vend extrêmement mal la communication, Blood Father compte bien plus sur son intimité familiale, ses dialogues solides à l’écriture sarcastique au service du vœu de rédemption, de l’affranchissement d’un passé boueux qui revient à la charge de façon lancinante aussi coupant qu’un tesson de bouteille et séduisant qu’une goutte d’alcool. Blood Father est autant une ode sauvage et intelligente au paternalisme qu’un constat des limites d’une société et de la fin proche d’un système qui ne laisse que gueules cassées et dérives. Le film matérialise son essence ensablée sur la fin de l’héroïsme ou plutôt de la cassure de l’image de l’héroïsme propre, au profit du véritable et non-fantasmé que représente la figure d’un père pour son enfant. La violence du nouveau long-métrage de Jean-François Richet, aussi dure et sanglante soit-elle, n’est jamais gratuite, illustrant autant proprement que salement un récit de complaintes et de contemplations non-loin d’un Blue Ruin et des meilleurs moments de Sons of Anarchy. Inattendu, presque inespéré, Blood Father est une petite perle de sensibilité perdue dans la poussière et le sang. Le film de la rentrée et sûrement parmi ce que 2016 peut vous offrir de mieux. A voir d’urgence !


Critique publiée chez : http://houseofwolves.fr/cinema-tv/chronique-flash-blood-father/

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le 2 sept. 2016

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