L'histoire se déroule dans un Londres des quartiers travailleurs, très vide, baigné d'un certain malaise palpable tout au long du film. D'un côté ces jeunes vaguement dans le vent, "à l'américaine", et de l'autre leurs pères, sortant du travail le regard bas, comme dépossédés. Que dire aussi de ce concert de rock, avec sa foule statique, juste avant la cohue générale ? Il y a décidément quelque chose de fort dans cette façon de filmer les fractures londoniennes, pour mettre en avant une tension sociale bien réelle.
Mais Blow-Up traite surtout d'un malaise psychologique. Celui de ce photographe impulsif, qui suit son propre chemin, un peu rêveur, mais qui aime garder la maîtrise de tout ce qui l'entoure. Cette session de photos volées dans un parc vide met en place l'essence même du film, ce côté distant et décharné. Évidemment, les déductions qui s'en suivent sont aussi saccadées que l'esprit du personnage à ce moment-là. L'arrivée des deux jeunes hystériques dans le loft du photographe rend la narration encore plus fragmentée : le héros perd ses repères, ne sait plus à qui se confier, jusqu'à cette fin magique, tout en symboles. Lui aussi ne serait qu'un mime, singeant la réalité sans jamais vraiment la photographier ? Où est la vérité là-dedans ?