"Our name will be forgotten. In time, no one will remember our work"
C'est l'une des dernières phrases de ce film qui n'en est pas un. Non, "Blue" de Derek Jarman n'est pas une oeuvre cinématographique, c'est un poème, entrecoupé de souvenirs tour à tour tristes ou touchants ; une parole qui ne cesse pas, portée par une musique fabuleuse et un fond bleu, toujours le même ; ce bleu qui est désormais la couleur de la vie, celle de Derek Jarman qui a perdu la vue car atteint du sida. Ce bleu c'est le bleu du ciel, de la sensibilité, de l'espoir, puisqu'on est encore en vie. Ce bleu aurait pu être noir car le bleu n'est que "l'obscurité rendue visible" ; les Egyptiens en avait fait une couleur synonyme d'immortalité, pour Derek elle n'est rien d'autre que ce passage de la vie à la mort qu'elle rend moins effrayant. On dit souvent que le bleu est synonyme de sagesse, l'oeuvre n'en manque pas :
To be an astronaut of the void, leave the comfortable house that imprisons you with reassurance.
Remember,
To be going and to have are not eternal - fight the fear that engenders the beginning, the middle and the end.
"Blue" est une expérience rare, déroutante ; ici l'image n'accapare pas le spectateur, ce sont les mots qui l'emprisonne, et c'est la vie qu'il écoute. Si Derek Jarman a réussi à attraper, à la volée, un petit bout de l'expérience humaine, il s'est néanmoins trompé sur une chose : le monde n'est pas prêt d'oublier son travail. En tout cas, pas moi.
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