Concilier les douces mélodies du jazz et les couleurs vives du manga est un pari un peu fou, qui plus est lorsqu'il est sous forme de Seinen silencieux (mangas-bd pour jeuens adultes), mais réalisé avec maestria par Shinichi Ishizuka dans les dix volumes de "Blue Giant".
Adapter les aventures de Dai Miyamoto, jeune jazzman parti conquérir la scène Tokyoïte dans un film d'animation sonore (contrairement au livre) parait donc une tâche infiniment plus aisée, de surcroit lorsque la bande originale est composée par la célèbre pianiste japonaise Hiromi Uehara, (lauréate d'un Grammy Award pour le meilleur album de jazz contemporain) accompagnée par le saxophoniste ténor Tomoaki Baba et le batteur Shun Ishiwaka.
Et effectivement la partition musicale est séduisante, de même que les premières scènes d'animation sont très prometteuses ; les premiers plans de Tokyo d'abord de jour, irradiée de soleil, puis baignée dans une lumière bleue pâle, voire bleue jazzy façon "La La Land" sont magnifiques, et la première prestation de saxo de Dai devant Yukinor, là où le son est aussi vibration et emplit tout l'espace est visuellement impressionnante.
Pourtant j'avoue n'avoir pas été aussi séduit par la suite, les scènes de construction dialoguées, certes importantes dans la représentation de la construction du groupe m'ont paru un peu trop didactiques, parfois répétitives ; bref les développement du récit sont bien longs, le film aurait probablement gagné à être plus court de quelques minutes.
Certes, les spectateurs plus familiers du rythme parfois abrupt du manga seront sans doute plus séduit, mais l'on peut également regretter un manque de lyrisme de poésie, le jazz pourtant se prëte à l'immersion avec ses mélodies envoutantes, enveloppantes... Tachikawa, le réalisateur peine à nous transporter à imprégner totalement son œuvre de la patine artistique qu'il aurait mérité.
Son choix de dresser un constant parallèle entre le travail des musiciens et la performance sportive (chaque représentation est une souffrance pour les personnages, la sueur et la fatigue sont de tous les instants) ne convaincra pas tout le monde, et certains regretteront probablement que la notion de travail acharné occulte presque totalement l'amour des personnages pour leur art.
La scène finale,
un concert empreint d'une grande dramaturgie suite à l'accident de Yukinor, tendant vers une sorte de délire psychédélique
que j'ai pour ma part trouvé plutôt réussie pourrait également dérouter un peu.