Bob le flambeur est le premier polar "un peu fauché" de JP Melville, un polar fait avec des bouts de ficelles, très particulier, très chaleureux. C'est donc un polar très différent de ceux auxquels il nous habituera par la suite, dans un style beaucoup plus âpre que pour Bob le flambeur.
Bob le flambeur c'est l'histoire d'un joueur invétéré de jeux d'argents surnommé "Bob le flambeur" et ancien gangster repenti qui s'est retiré des affaires, mais qui finira par succomber à la tentation de replonger dedans, puisqu'il va finir par planifier le braquage du casino de Deauville. Mais en fait, bien plus qu'un film de braquage, Bob le flambeur c'est surtout un film qui met en scène Paris, Pigalle, des flics et des gangsters. Le film s'intéresse beaucoup plus à ses personnages et à son lieu, qu'à la planification puis l'exécution du braquage. C'est clair que Melville est tombé amoureux de ces petits caïds sympathiques, de Montmartre et de ses nuits parisiennes, il s'attarde donc principalement là-dessus.
Bob le flambeur c'est donc en quelque sorte le portrait d'un gangster "sympathique" incarné par Roger Duchesne, au talent d'acteur dirons-nous "discutable". C'est clair qu'il en fait un poil trop dans le style du "vieux beau", mais finalement c'est ce surjeu qui le rend encore plus sympathique. Le gars semble être tout le temps en représentation, tout est un poil trop appuyé. Et face à lui, on voit les débuts au cinéma d'Isabelle Corey, alors seulement âgée de 15 ans et sans aucune expérience du cinéma. Non vraiment, ça se voit que ce n'est pas une comédienne. Toutes ses répliques, elle les sort sur le même ton monotone. Par contre, elle est très à l'aise devant la caméra, elle a une gestuelle très séductrice et là encore ça renfonce ce côté très singulier du film. Et puis elle n'a que 15 ans, mais elle n'hésite pas se dénuder devant la caméra et avouons-le elle est magnifique.
On repère déjà ici le style très formaliste Melville, un mélange de plans filmés en extérieur (très réalistes) et d'autres filmés en studio (très stylisés). Tous les plans en extérieurs semblent être improvisés, un peu chaotiques, tandis que tous les plans en appartements (et donc en studio) sont manifestement ultra préparés dans le moindre détail et ils sont magnifiques. C'est là en intérieur qu'on repère déjà le style de mise en scène de Melville qui fera sa renommée, un style qui sera tellement copié par la suite et encore aujourd'hui (aka les polars HK et coréens).
Bob le flambeur est un polar très singulier dans la filmographie de JP Melville, c'est presque plus une comédie qu'un polar. C'est aussi le portrait plein de tendresse d'un vieux gangster et c'est un film hautement recommandable.