Dans Boîte Noire, on apprend que la boîte du titre est, contre toute attente... Rouge, et qu'elle se situe dans la queue de l'appareil, l'endroit où statistiquement, elle a le moins de chance d'être endommagée.
On apprend aussi qu'en cas d'accident, si on collecte toujours les débris pour reconstituer le gigantesque puzzle du crash dans un hangar fermé à double tour, tout est aussi histoire de son, un peu comme avec François Civil dans Le Chant du Loup.
Pierre Niney et sa Boîte Noire en reprennent l'efficacité brute et la manière immédiate d'attraper le spectateur pour ne plus jamais relâcher son emprise, ni abandonner son attention en cours de route. Le tout avec un sujet anti cinématographique au possible à première vue. Grave erreur cependant que de s'arrêter à cela.
Car comme dans Le Chant du Loup, tout sera d'abord affaire de casque audio, de grésillements, d'indices fugaces permettant les plus folles théories alors même que l'image manque. Et donc une partie de la vérité du crash autopsié.
Et comme dans le fameux film de sous-marin de 2019, l'oeuvre de Yann Gozlan est menée tambour battant et instille une tension de tous les instants, en menant son enquête en mode thriller seventies sûr de lui et qui avance à la façon d'un bulldozer qui emporte tout sur son passage. Comme si soudain, Boîte Noire se muait en film policier, explorant chaque piste sous l'emprise du son multipliant les hypothèses, les pistes, les mystères et les incertitudes.
Au point que son héros, comme ces flics de naguère emportés par leur instinct, en vient à contaminer sa vie privée, à nourrir une sorte de paranoïa contagieuse, au point de se heurter à un mur d'incompréhension. Seul contre tous aussi. Un peu...
Il est rafraîchissant de voir en salles un film français aussi ambitieux, aussi sûr de sa force et n'hésitant jamais à flirter avec les frontières de l'horrifique et de l'histoire qui pourrait s'avérer être vraie. Dans des décors d'une froideur clinique, Pierre Niney incarne un acousticien tenace, obsessionnel et obstiné qui devient le véhicule d'une puissance cinématographique assez démentielle à l'écran. Et ce sans aucune action grandiloquente à l'écran. Seulement la quête de vérité d'un homme avec ses certitudes, son exaltation, ses failles et sa face sombre. Sans autre artifice que celui de ses rebondissements multiples, que son aspect, par instant, quasi documentaire qui parachève une immersion totale dans les rouages implacables d'un film d'une redoutable efficacité, qui fait que l'on ne voit pas passer les plus de deux heures de projection. Tandis que le final implacable de l'oeuvre achèvera de convaincre les plus rétifs au genre, tout comme la musique obsédante de Philippe Rombi, qui semble issue d'un autre monde.
Et alors que l'on vous prédit déjà que Dune sera à coup sûr le film de cette année 2021, il est évident qu'il y aura aussi à ses côtés cette incroyable Boîte Noire.
Behind_the_Mask, l'homme qui murmurait à l'oreille des avions.