Boogie n'est pas une brute épaisse au grand cœur qui fait un métier pourri. Boogie est une brute épaisse. Et il l'aime, son métier. Ancien combattant reconverti en tueur à gage, il n'aime rien tant que massacrer, écrabouiller, éviscérer, égorger, écharper, brutaliser, exterminer, étriper, sauf peut être le fric que ça lui rapporte. Boogie, donc, aime son métier. Et il le fait bien. Se faire souffler un contrat par un trou d'balle mal recousu, c'est pas pour lui. Les mafiosi de la ville n'ont qu'à bien se tenir! 'Fallait pas mettre Boogie sur la touche. Et si au passage il sauve une demoiselle en détresse, ce n'est pas tout à fait exprès.
Boogie est un homme sans concession Ni à la moralité, ni au politiquement correct. Bourreau des cœurs et bourreau tout court, il trace sa route à coups de gros calibre balançant stoïquement piques cruelles et traits d'humour douteux. Et d'abord on rit de bon cœur des saloperies de ce parfait salaud. Mais le soufflé retombe vite. C'est là le problème de ce genre de personnage: caricature engoncée dans ses défauts, Boogie est de ceux qui ne peuvent évoluer d'un iota sans se trahir totalement. Et il en va de même pour les autres protagonistes. Rapidement esquissés dans un style cartoonesque ils campent des personnalités bien typées, de l'impitoyable mafieux ratatiné à la bimbo un peu cruche - quoique furieusement rancunière.
Et ça ne manque pas d'efficacité. Le graphisme simpliste hérité de la bande-dessinée de Fontanarrosa fait mouche quand il s'agit d'ébaucher en quelques secondes ces archétypes de films noirs. Mais l'animation ne suit pas. Parfois maladroite, souvent raide: notre (anti)héro et ses comparses se traînent un peu. Boogie est une armoire glace et il se meut avec la même grâce. Comme son univers, il manque de finesse et surtout de dynamisme. Là où le récit tente d'imposer un rythme soutenu, l'animation semble ne pas suivre l'action.
Boogie met la ville à feu et à sang et on baille poliment.
Car Boogie, il ne fait pas dans la dentelle. La subtilité, ce n'est pas son fort. Si on peut donc apprécier son côté déjanté et parodique, on peut surtout regretter que la caricature ne soit qu'une caricature sans autre intention que celle de faire rire sur fond de polar. Louable intention, certes, et si l'on entre dans le jeu, l'effet est plutôt réussi. On s'amuse du brutal détachement du tueur à gage le plus badass d'Argentine, du naïf aveuglement de ses conquêtes parfois involontaires.
Mais on s'ennuie aussi, au fil d'un scénario trop convenu. A trop détourner les clichés, il oublie de les éviter et en devient prévisible. L'humour trash mais sans acidité n'arrive pas à donner suffisamment d'élan à une histoire qui s'empêtre dans ses références.
Boogie est bourré de défauts dans tous les sens du terme. Si sa réputation d'infaillible tueur à gage n'est pas usurpée, il n'est finalement pas la hauteur de lui-même: Boogie n'invente rien, Boogie ne renouvelle rien. Finalement, Boogie se contente de peu.
Mais quelque part, Boogie est tout de même foutrement rafraîchissant, tout puant qu'il soit!