Si tu cherches un héros, va voir ailleurs !
Il est dur actuellement de réussir à se faire une place dans l'animation, le domaine étant largement cannibalisé par les Studios Disney. C'est d'autant plus dur quand on est un studio Argentin, et que l'on fait dans la violence la plus barbare, et c'est probablement ce qui expliquera que Boogie soit passé complètement inaperçu dans nos salles, à l'inverse de l'Argentine, où il a cartonné.
Boogie est un « travailleur » indépendant. Vous le payez pour protéger quelqu'un, il le fait, vous le payez pour tuer quelqu'un, il le fait aussi, et pour tuer, c'est le meilleur, tout du moins c'est ce qu'il pensait, jusqu'à ce que Blackburn, un mystérieux concurrent, nouveau dans le métier, fasse son apparition. Chargé de protéger Marcia, une femme qui doit témoigner au procès d'un parrain de la mafia, il devra réussir à maîtriser cette hystérique qui n'en fait qu'à sa tête tout en se préparant à affronter Blackburn, lancé à leurs trousses.
Si vous en avez assez des lapins qui chantent dans les bois et autres ogres râleurs, et que vous voulez un véritable méchant, Boogie est là pour votre service. Gustavo Cova, le réalisateur, pisse littéralement sur l'animation en général, à grands renforts d'hémoglobine, de sexe, et d'immoralité, et comme si l'on avait pas compris quel empire il visait, il le met carrément en scène, transformant le logo de Walt Disney en « War Lang », avec un château de La Belle au bois dormant fait en missiles et Clochette armée d'une sulfateuse. Cova pousse un cri du coeur, le même que pousse tous ceux qui en ont marre de n'avoir que sous la main des dessins-animés niais regorgeant de personnages cul-cul. Comme une marionnette, Cova nous fait voir tout ce qui nous passe par la tête, car c'est le sujet, nous montrer ce que l'on ne verra jamais, ou peu. Un enfant transformé en passoire ? Pas de problème. Des chiens, chats ou lapins tout mimi dégommés ? Y'a qu'à demander. Eclater la tronche d'une vieille ? Boogie est là pour ça.
Boogie est en quelques sortes le Marv de Sin City, à cela prêt qu'il n'a VRAIMENT aucune morale, ni aucune faiblesse pour quelque femme que ce soit. C'est sa force, mais c'est aussi ce qui fait la faiblesse du scénario. Car si la vengeance de Marv était le moteur scénaristique de Sin City, ici il est bien plus maigre, voir presque inexistant. Boogie n'est pas ennuyeux, loin de là, mais l'on aurait aimé une trame plus conséquente, histoire que le spectateur soit un peu plus impliqué, car à force de nous servir des blagues immorales, amorales et machos, ainsi qu'une violence extrême, Cova en oublie presque de nous raconter quelque chose. Pour son excuse, on précisera que la bande-dessinée dont il s'inspire, créée par Roberto Fontanarrosa, était sous forme de strips, et donc sans véritable trame.
Bref, Boogie est un superbe défouloire, qui bien qu'il pêche par excès de violence, n'offrant qu'une histoire dont on se fout un peu, comble largement nos attentes en matière de boucherie pure et dure. Véritable cadeau destiné aux amateurs d'animation sanglante, il est sûr qu'il deviendra culte pour beaucoup. Le dessin quant à lui pourra ne pas plaire à tout le monde, les protagonistes étant tous particulièrement laids. Reste néanmoins des décors superbes, que ce soit ceux en dessin pur ou en image de synthèse, et multipliant les parallaxes. Certains plans sont d'ailleurs très réussis, rappelant les vieux westerns ou les Inspecteur Harry, et Cova s'arrête même à la case Sin City, nous offrant quelques clichés en bichromie négative. L'humour y est noir, très noir, en opposition constante avec la bienséance, et c'est exactement ce que l'on attendait.
Pour conclure, les âmes en peine se sentant délaissées par une industrie de l'animation toujours plus ciblée pour les kids ne pourront qu'accueillir ce Boogie avec entrain. Les allergiques au style, ou qui s'attendaient à quelque chose de plus consistant grinceront des temps, mais soit, tant pis pour eux.
Mention spéciale pour la modélisation 3D de certains véhicules et décors, donnant une véritable valeure ajoutée à l'oeuvre, et surtout bien mieux maitrisée que dans la plupart des dessins-animés incorporant ce genre de technique (cf Dead Space et consorts).
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