Avant de partir tragiquement, l’irrésistible Robin Williams offrait à ses fans un dernier film, clôturant sa longue carrière. Dire adieu n’est jamais une chose facile, encore moins pour un acteur que l’on aimait depuis tant d’années. Projection sans cesse repoussée, je me lance enfin dans la vision du tout dernier film de l’acteur qui a accompagné mon enfance. Je n’arrive toujours pas à croire que je suis sur le point de lui dire au revoir…
Un dernier au revoir à un grand du cinéma américain
Quatre années, c’est le temps qu’il aura fallut pour voir Boulevard, dernière sortie d’un film de l’acteur Robin Williams disparu en Aout 2014. Tout comme Géant avec James Dean, Bruce Lee dans Jeu de mort, on visionne Boulevard avec un sentiment fait à la fois d’amertume et de mélancolie. Nous sommes en train de regarder le dernier film d’un acteur. Impossible de ne pas faire le parallèle entre la dépression ayant conduis Robin Williams au suicide et l’âme même de son dernier film. Un homme qui cachait depuis sa vie un mal être profond et qui décide un jour de s’en libérer.
Boulevard, c’est l’histoire d’un homme de la soixantaine faisant tardivement son coming out. La trame n’est pas franchement inédite, on a déjà vu ce type de film indé au rythme lent et doux, comme l’ait le personnage de Nolan. La mise en scène et la réalisation seront 100% film indé avec ces plans larges, ces moments silencieux permettant d’accentuer le regard de nos protagonistes, ces nombreux plans cadrant coté conducteur Nolan errant la nuit dans les rues pas franchement pures. Nous voila plongé dans la vie de Nolan. De son emploi à la banque à sa maison qu’il partage avec sa femme, du lit d’hôpital de son père aux rues sombres bardées de prostituées, jusqu’à ses discussions dans une chambre de motel avec Léo, Nolan nous fait traverser son histoire dans une sorte de bulle qu’il c’est lui-même forgé.
Les gens disparaissent, mais pour certains, ça parait injuste.
L’homme brisé se dévoile
Pour tout dire, le film a beau être du déjà vu, banal d’un point de vue scénaristique, ce n’est pas ce que l’on retiendra. Ce n’est pas le plus important. L’important c’est qu’il est émouvant et surtout, qu’il demeure un bien bel adieu à un acteur tant aimé. Difficile de se montrer donc sévère à l’égard de cette œuvre. D’autant plus que Robin Williams croit en son personnage dont il c’est imprégné, nous livrant une performance proche de celle du film Photo Obsession.
En quelques scènes, la tristesse s’empare de moi. Robin Williams, c’était un clown triste, un homme qui adorait faire le pitre, cachant en lui de profondes blessures qu’il tente de masquer. Ici, plus de clown, l’homme blessé, brisé se dévoile, ouvre véritablement son cœur devant le spectateur abasourdi de voir la véritable facette du comique. L’acteur exprime enfin le poids de son silence, fait preuve d’une sensibilité extrême.
Aucune méchanceté, aucune vulgarité, aucun signe de quoi que ce soit à l’horizon pouvant le rendre répugnant, Nolan bien que maladroit, est un homme bon mais perdu. Alliant sensibilité et tendresse, le réalisateur de Boulevard a sût capter la psychologie, l’âme de Robin Williams et de son personnage cherchant le véritable sens de sa vie. Tout comme d’autres avant lui, Nolan c’est mentit à lui-même depuis de nombreuses années, à jouer un rôle qui lui convenait sur le coup, mais la brisé plus tard. La rencontre avec Léo va réveiller en lui des blessures enfouies depuis l’enfance.
Le couple qu’il forme avec Kathy Baker (la voisine un peu trop marie-couche-toi-là d’Edward aux mains d’argent) interprétant sa femme Joy est authentique. Ils ont beau traverser une période difficile et faire chambre à part, les petites attentions sont là, on sent la complicité. Pourtant, de par sa rencontre avec Léo, le couple Nolan/Kathy va être bouleversé. Kathy soupçonnera très vite que quelque chose cloche. Quelle sera sa réaction ?
Peut être qu’il n’est jamais trop tard pour vivre la vie que l’on
voulait.
Un drame tout en pudeur
Une histoire d’homosexualité et de prostitution, doit on en conclure qu’il y aura des scènes chocs voir trash ? Non, hormis quelques répliques un poil crues, pas de relations sexuelles, pas même d’embrassades. Boulevard est sage. La raison de cette absence de scènes sera d’ailleurs justifiée à travers le personnage de Nolan. En fait, de ce coté là, Boulevard pourrait presque avoir deux interprétations concordant : l’homosexualité refoulée et enfin libérée de Nolan, et le fait que cet homme paumé, n’ayant jamais eu d’enfants, voit en Léo le fils qu’il n’a jamais eu. Beaucoup de scènes le montrant tenté de sortir de la prostitution le jeune homme nous le prouvent. Nolan ne cherche pas vraiment à avoir un partenaire sexuel, il a besoin de rapport humain authentique où il peut enfin être lui.
Robin Williams porte le film sur ces épaules certes, mais il est entouré d’acteurs plutôt talentueux. Dans les rôles secondaires, on reconnaitra Bob Odenkirk, interprète de Saul Goodman dans Breaking Bad et Better call Saul, interprétant le meilleur ami de Nolan, et bien entendu Roberto Aguire l’interprète de Léo. Manque de peps du coté de l’acteur parfois à l’ouest. On ne le sent pas à sa place. Malaise dans le rôle de jeune garçon perdu ne sachant pas quoi faire de sa vie?
Un soir, j’ai pris une rue que je ne connaissais pas. La vie est comme
ça parfois. On prend une rue, puis une autre. Et aujourd’hui, une
autre.
Ce qu’on retiendra de ce film ? Boulevard se veut rempli d'espoir. L'espoir que même à 60 ans, on peut encore avoir un avenir différent, changé de vie.
Robin Williams s’en est allé. Lui qui, à travers ses nombreux films, m’a aidé à traverser des moments difficiles, lui qui, à travers ses personnages drôles ou sérieux, trouvait toujours les mots justes pour ne jamais désespérer dans la vie, ne reviendra pas. Toi qui était un homme bon et généreux, toi qui disais tout haut ce que tout le monde pensait tout bas, toi qui adorait faire rire parce que ça t’aidais à combattre toute cette souffrance enfouie dans ton cœur, toi qui t’es battu pendant des années pour vaincre ce nuage noir envahissant tout ton corps, tu as un jour déposé les gants, laissant le mal triompher en te donnant la mort. En partant, tu auras laissé seuls tous les êtres qui t’aimaient : ta famille, tes amis, et tes fans devenus orphelins. Beaucoup t’ont pleuré, d’autres t’ont déjà oublié, moi, je ne t’oublierais pas. Merci.
Au final, même si on s’attendait à quelque chose de plus touchant, de plus percutant, de plus surprenant, Boulevard demeure malgré tout un joli drame à la fois gentillet et émouvant, prouvant pour la toute dernière fois que la carrière de Robin Williams ne se résume pas qu’à des rôles de types décomplexés. Ca, il l’aura prouvé jusqu’à la conclusion de son histoire.