Le plus grand malaise cinématographique contemporain.

Il m'est arrivé aujourd'hui une expérience tout à fait inédite autant que déplaisante. Jamais un sentiment nouveau à ce point n'avait fait irruption en mon âme tourmentée à la simple vision d'un film et si tel avait été le cas, si des sentiments du même acabit et de la même intensité m'avaient déjà traversé le corps comme des poignards lancés à pleine puissance, mon inconscient aurait mis tout en œuvre, sinon de les supprimer, du moins de les enfouir si profondément qu'à côté de cela, même les déchets nucléaires les plus toxiques eussent paru être à ciel ouvert. Mais, à la fin de la séance, quand les lumières sont réapparues dans les ténèbres de la salle de cinéma, et quand le générique s'est déroulé le long de l'immense écran, très commun dans ce genre de salles (puisqu'il s'agit justement d'une salle de cinéma, cqfd), j'ai remercié le coronavirus d'exister pour pouvoir aussitôt recouvrir mon visage du masque chirurgical afin tout simplement de passer inaperçu. Car là était la grande nouveauté : un sentiment de honte d'une violence rarement égalée dans le domaine sembla m'avoir fracassé l'échine. A côté de ce gêne immense (ou de cette gênance, de ce malaise ou de cette malaisance pour les 2000), la marche de la honte de Cersei Lannister, nue dans les rues de Port-Real, recevant des tombereaux d'injures et des tomates à la figure, n'est qu'une promenade de santé douce et joyeuse.


Mais que diable ce génie de Gérard Darmon est-il allé faire dans cette galère ? Pourquoi ce film, qui évoque davantage un étron fumant que les Frères Lumière, peut-il être diffusé dans les salles obscures quand des milliers de projets d'indépendants ne restent que des projets destinés aux corbeilles des producteurs ? Comment le deuxième cinéma du monde peut-il tolérer des telles infamies visuelles qui, au mieux ennuient, au pire provoquent au suicide des centaines de spectateurs déjà bien attristés par l'état du monde actuel ? Que cette troupe d'acteurs médiocres, comme Clémentine Célarié, Carole Bouquet ou Lannick Gautry se vautrent dans cette fange afin de tenter de faire survivre des carrières boîteuses : je peux encore l'admettre, mais que des gens sérieux puissent oser mettre les pieds dans ce projet me paraît invraisemblable ! Y'a-t-il ici une sinistre affaire de chantage ? Les producteurs ont-ils accepté ce projet dans un but alimentaire ? A-t-on lu le synopsis sous l'effet de l'alcool et de la cocaïne ? Non ? Parce qu'il me semble tout bonnement impossible de consentir à mettre de l'argent dans un tel film sans être un poil débile mental. Si le film devait être jugé, sans doute que l'infraction principale serait le manque profond de vraisemblance, de subtilité, de talent mais encore tout simplement d'humour. Pire, il serait jugé pour avoir provoqué la honte du spectateur qui s'enfuit, alors que la véritable honte, c'est quand même ce film. A la revoyure.

PaulStaes
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le 26 sept. 2020

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Paul Staes

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