Présentant sur un peu plus d'une heure de métrage le quotidien d'un troupeau de ruminantes dans leur intimité Emmanuel Gras pose et propose avant tout un regard sincère et audacieux sur les sujets filmés ; il réalise un documentaire d'une belle, d'une élégante humilité, qui ne s'encombre pas d'une morale réductrice ou d'une psychologie de bazar quelconque : il montre les vaches en toute simplicité, avec leur placidité, leurs beuglements et leur ennui. Ni plus, ni moins.
Bovines est avant tout un film d'acclimatation, risquant de sembler parfois ennuyeux ou du moins rébarbatif. Loin d'appartenir à la catégorie des films altermondialistes - ou, plus généralement, institutionnels - cette première incursion dans le cinéma permet à Emmanuel Gras d'apprivoiser cette famille de vaches sans porter de jugements sur les éleveurs ou sur l'élevage. Le choix de capter les bêtes bovines dans tout leur stoïcisme et dans toute leur inertie confère à l'ensemble un rythme moins lassant que véritablement apaisant. Le réalisateur s'essaie de temps à autre à des expérimentations formelles un brin gratuites mais séduisantes, oxygénant nos neurones à renforts d'effets sonores remarquablement travaillés. Une belle surprise, prometteuse et surprenante de sympathie.