Les instants qui nous saisissent.
Le concept, inédit au cinéma, laisse difficilement indifférent : Richard Linklater (réalisateur de la trilogie des Before) a filmé sur douze ans les mêmes acteurs en centrant son histoire sur le personnage de Mason, 6 ans au début du film et 18 donc (vous aviez fait le calcul vous même) à la fin.
A une ère où les séries ont pris le pas sur le cinéma, un tel dispositif qui permet à la fiction de considérablement développer ses personnages intrigue autant qu'il fait peur. Le résultat se joue des attentes et installe avant qu'on s'en rende compte une fresque sur le temps qui passe, habilement rythmée par la culture pop (de Sheryl Crow à Lady Gaga, en passant par Facebook et Obama). Un concept proche du documentaire qui se fait vite oublier, fait du spectateur le témoin privilégié d'un récit généreux et tendre qui touche souvent à l'universel. Pas seulement parce que ce récit est celui de tout le monde, mais parce que Linklater a su saisir des moments clés, l'énergie, la mélancolie, la dureté du passage à l'âge adulte et créé une interaction directe avec le vécu de tout le monde. Le film se déroule au Texas, mais ça n'a finalement aucune importance
La caméra virevolte mais n'effleure jamais, n'est pas dans la contemplation mais pas dans la démonstration non plus. Il y a un beau paradoxe entre l'ampleur écrasante du projet et la simplicité du résultat qui n'est pas avare de réflexions (le passage à l'âge adulte bien sur, le poids du temps, ce qui motive les choix de vies et fait dévier leurs trajectoires) mais se garde plutôt bien de délivrer des messages. En se contentant de rester attentif à ses personnages, Boyhood aura capté l'essentiel.