⚠️ Une maintenance est prévue ce Mercredi 4 décembre de 9h00 à 13h. Le site sera inacessible pendant cette période.

Le temps est fascinant. D'autant plus face au constat de l'évolution qu'il rythme tout en restant constant. C'est souvent dans ces histoires de vie simples et riches à la fois que le 7eme art est le plus généreux et sincère dans les sentiments. Pour autant c'est extrêmement rare que le cinéma retranscrive franchement l'attachement au fil du temps. En cela "Boyhood" est une double réussite, récit touchant et vrai qui s'étend tendrement avec des références universelles et marquées.

Chaque vie est une traversée de périodes éphémères. Retrouvailles, nouvelles connaissances, moments déroutants. Ces ingrédients pleins de surprises font la beauté d'une vie guidée par un fil commun et une compagnie fidèle. Comme avec la série des "Before...", Richard Linklater s'appuie sur le temps pour accentuer notre empathie à l'égard de ses personnages. La continuité fonctionne encore plus que l'épisodique. Les conditions exceptionnelles de tournage apportent une authenticité fabuleuse à cette traversée des années.

Baser un scénario sur douze années et le tourner en autant de temps pour le bien de la cohérence est à la fois brillant et exigeant. Un pari osé qui a probablement effrayé beaucoup de monde. Le simple fait d'avoir mené ce projet à bien est une performance incroyable. Il résulte de ce pari un vrai coup de génie.
On est en admiration face à la simple transformation de l'âge. Ça devient plus évident sans besoin d'artifices, tel maquillages et perruques. Néanmoins l'étendue du tournage ne simplifie pas nécessairement l'écriture. Comme leurs rôles, les comédiens évoluent et il est difficile de l'anticiper. Au-delà du simple fait de réunir les concernés très régulièrement, il faut s'adapter aux aspects et aux ressentis de chacun. Il ne pouvait pas y avoir de doute sur la linéarité physique au fur et à mesure de l'avancée, c'était une toute autre mission que de garder une cohérence dans le récit. Là encore, "Boyhood" ne dévie jamais de sa bonne trajectoire. En préservant une grande curiosité, les histoires se lient avec logique et les personnages évoluent avec harmonie.

Les aventures familiales se répondent au fil du temps. Les moments forts de séparations, de disputes ou de violences sont traités avec toutes la force qu'ils nécessitent et marquent ainsi la personnalité de ses protagonistes. L'âme d'artiste de Mason et le ton maussade de sa sœur Samantha mûrissent avec une franche évidence. Les précisions du scénario et du jeu apportent tout les éléments propices à la sollicitude. Le récit s'intègre parfaitement dans un univers familiers de tous.

La relation des personnages avec le monde réel est saisissant. Il y a tout un tas de références qui nous permettent à la fois de situer temporellement l'histoire et de s'y reconnaître.
D'abord des références pop; un bel hommage à "Harry Potter" avec la lecture d'un extrait du deuxième tome et la scène (très chouette) de la sortie du "prince de sang-mêlé", des allusions à Star Wars ou aux Beatles qui sentent la vraie passion. Avec la bande-son très travaillée, ces allusions permettent de dater assez précisément les événements. L'évolution de l'informatique et des consoles est aussi très présente.
Ensuite des références politiques. Axé autour des campagnes de 2004 et 2008, le propos est très engagé. Mason Sr (Ethan Hawke) est un militant anti-républicain avec un franc parlé, trop peu entendu dans la culture américaine. Ses convictions donnent aussi des moments amusants lorsqu'elles entraînent ses enfants. "Boyhood" est une suite de rencontrent qui dressent un portrait éclectique de l'Amérique. Du professeur pas si respectable à la famille de Texans pas fine mais follement généreuse en passant par le militaire aux belles paroles, ces personnages (et les autres) cassent les préjugés. Plusieurs visions de l'Amérique, profonde et dynamique. Le vice et la violence se trouvent dans un personnage qu'on croit bien éduqué, la bonté et la générosité se dégagent d'une famille qu'on qualifierait d'arriérés.

Le pari fou de Linklater est une évidente réussite. Un parcours familiale plein d'authenticité qui montre une Amérique humaine qui suit le cours du temps. Très belle histoire de vies, ponctuée par une réplique très juste « Ce n'est pas nous qui saisissons le moment, c'est les moments qui nous saisissent ».

Créée

le 7 sept. 2014

Critique lue 540 fois

6 j'aime

Adam Kesher

Écrit par

Critique lue 540 fois

6

D'autres avis sur Boyhood

Boyhood
Sergent_Pepper
7

Un rêve : l’histoire du temps.

Boyhood fait partie de ces films à concept qui prennent un risque majeur : se faire écraser par lui en s’effaçant derrière cette seule originalité. Suivre pendant 12 ans les mêmes comédiens pour les...

le 18 janv. 2015

100 j'aime

9

Boyhood
Rawi
7

12 years a child

En préambule, je voudrais pousser un coup de gueule ! Depuis le temps que j'attends ce film, je n'étais plus à une quinzaine près mais ayant l'opportunité de le voir en avant première, je me rends...

Par

le 23 juil. 2014

88 j'aime

39

Boyhood
guyness
7

Une vie de mots, passants

Quand on lance un film expérimental de 2h46 avec une pointe d’appréhension, l’entendre s’ouvrir sur du Coldplay fait soudain redouter le pire. Faut dire que j’arrivais sur un territoire d’autant plus...

le 18 janv. 2015

82 j'aime

17

Du même critique

Hunger Games : La Révolte, partie 1
adamkesher01
6

Katniss Everdeen et l'Ordre du Gai Moqueur

Après l'embrasement, les cendres. Dans un rythme et un ton différent des deux premiers épisodes, ce troisième opus tient le fond et la forme de la saga. La double romance prend déplorablement de...

le 22 nov. 2014

24 j'aime

1

3 cœurs
adamkesher01
3

Vérité nulle

Tout ce que la bande-annonce de "3 Cœurs" laissait présager de mauvais y est. Un récit formaté et bâclé à la fois, des acteurs enfermés dans des rôles extrêmement redondants et une mise en scène...

le 20 sept. 2014

22 j'aime

11

Les Profs
adamkesher01
3

Bande déchainée

«J'ai avoué avoir écrit ce film avec un prof de français mais il n'empêche qu'il est très con» Voila les dires, rassurants je trouve, qu'avaient Pierre-François Martin-Laval pour lancer la toute...

le 4 mars 2013

18 j'aime