Une aventure dont vous êtes le brave

Brave Story est une série de romans de Miyuki Miyabe, qui a même eu les honneurs d’une traduction par chez nous, et d’une ribambelle d’adaptations : mangas, jeux vidéo et bien entendu un film, sorti en 2006.

Cette histoire d’un brave, c’est celle de Wataru, un jeune écolier de 11 ans qui voit son monde s’effondrer : son père quitte le domicile familial, sa mère effondrée se retrouve à l’hôpital. Un nouvel et mystérieux camarade, Mitsuru, lui ouvre, un peu sans le vouloir, les portes d’un nouveau monde : Vision. Les « visiteurs » de ce monde, tels que Wataru, ont alors la possibilité de se voir exaucer un vœu s’ils s’en montrent dignes. Le jeune héros un peu désemparé se voit contraint de devoir suivre cette quête, d’autant qu’il se retrouve alors en concurrence avec son nouvel ami, Mitsuru, qui n’a pas la même bienveillance que lui.

Brave Story est donc ainsi le récit d’une quête initiatique, celle d’un petit gars un peu banal, confronté à des difficultés de petit garçon et qui espère que les promesses de Vision pourront les résoudre. Wataru est un peu maladroit et effacé mais sous l’influence de ses rencontres il va progressivement gagner de plus en plus de stature, tout en restant du bon côté de la barrière morale. Ce n’est plus le cas de Mitsuru, déjà coupable d’être allé trop loin et de continuer à vouloir dépasser la ligne morale.

Leur relation est d’ailleurs l’un des points forts du film, car si leurs méthodes sont différentes et devenues contraires, l’un et l’autre ont gardé une certaine complicité, mais l’amitié qui était en train de se forger est maintenant concurrencée par la rivalité. Brave Story leur offre les personnalités les plus étoffées, n’hésitant pas à questionner l’éthique de nos choix. La conclusion n’en sera que plus poignante.

L’un des autres points forts est la découverte du monde de Vision, monde de magie et de fantaisie. Pour le découvrir, Brave Story reprend la forme d’un jeu de rôle japonais, où la quête principale, récupérer tous les artefacts magiques pour invoquer son vœu, permet à Wataru de récupérer de l’équipement, des objets magiques, mais aussi de rencontrer des alliés qui l’accompagneront dans ses aventures. D’un point à l’autre cette équipe devra se défaire des ennemis et des difficultés présents dans chaque nouveau lieu. Pour que Wataru devienne suffisamment fort pour l’épreuve finale, mais dont l’exercice de force ne sera peut-être pas autant physique mais psychique.

Il y a donc une certaine curiosité à découvrir la prochaine étape du parcours, et les personnages présents, alliés ou ennemis. Cependant Brave Story donne aussi l’impression de ne pas savoir ce qu’il veut offrir. Il offre un rythme assez paisible, qui tranche pourtant avec la dangerosité présentée de certaines scènes. Le film offre la sensation de ne pas vouloir appuyer ces passages par une mise en scène un peu plus dynamitée, qui leur apporterait un peu plus de présence. On peut déceler quelques angles un peu audacieux, dans des montages un peu cassés, parfois déstabilisants. Mais il se dégage de l’ensemble une certaine impassibilité, qui jure un peu avec le contexte ou les exactions de Mitsuru, certes pendant longtemps hors-champs.

Peut-être que Brave Story ne veut pas se plier aux dictats du spectacle à tout prix, peut-être aussi qu’il n’en a pas les moyens. Il faut toutefois lui reconnaître qu’il brûle toutes ses cartouches pour sa conclusion, une fois Mitsuru à la limite de faire le pas de trop. Mais il est vrai que l’esthétique de Brave Story reste assez consensuelle, un peu passe-partout dans l’exploration d’un tel monde, mais qui invite assez facilement le spectateur dans son périple, il n’y sera guère dépaysé. Certains personnages ou certains lieux offrent tout de même une certaine présence, et même si Wataru et ses compagnons sont assez simples, ils se révèlent tous attachants, grâce à leurs designs mais aussi leurs personnalités.

Quête initiatique plutôt que grande aventure, Brave Story semble avoir fait son choix, pour un film dont l’intérêt tient avant tout sur sa relation avec son antagoniste que sur les péripéties croisées sur le chemin. Il survole malheureusement beaucoup de points, mais les romans ou les mangas permettent probablement de développer le monde de Brave Story.