Silent mourning
“I'm an ordinary woman. I didn't think such violent things could happen to ordinary people.” Dans cet extrait de la confession silencieuse que Laura fait à son mari, tous les choix qui font de...
le 2 mars 2017
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Premier plan : un train s’éloigne dans un nuage de fumée blanche, le train qui réunit ou sépare les personnes qui s’aiment. Image emblématique de cette histoire d’amour impossible.
Un employé de gare débonnaire entre dans le café buffet, comme chaque jour, il vient boire son thé tout en faisant sa cour à la tenancière du buffet, une femme d’un certain âge à l’allure sèche et sévère. Une histoire qui s’inscrit visiblement dans le temps. Assis dans un coin un homme et une femme, aux visages tristes et graves. La vision qu’ils offrent est en contraste avec la conversation enjouée qui s’établit à deux niveaux entre l’employé et la tenancière, formant le bruit de fond de la scène. Tandis que l’homme et la femme sont toujours là, assis l’un en face de l’autre, une femme entre, le type même de la commère jacassière. Elle reconnaît la femme assise, Laura, et s’immisce dans l’intimité de ce couple sans se faire inviter et sans manière. Après avoir envoyé l’homme lui chercher du thé, elle dit à Laura sur un ton complice :* « Il est charmant ! Petite cachottière ! »* Bientôt l’homme doit partir, il a un train à prendre et il se prépare à partir avec sa famille en Afrique en tant que docteur. Laura reste là et fait un malaise. En quelques minutes, à travers cette course scène sans rien savoir des personnages, de leur vie, de leur histoire, nous comprenons tout. Le reste du film va nous en apprendre davantage à leur sujet avant de revenir à cette même scène désormais éclairée par ce qui a précédé et rendue encore plus dramatique par le poids de ce qui vient d’être raconté.
Cette histoire se déploie sous la forme d’une confession muette et mentale que Laura fait à son mari, la confession de la passion dévorante qui est née entre elle et un inconnu rencontré au café-buffet de la gare où elle vient chaque jeudi pour ses affaires de la semaine. Une passion brève mais intense qui aura duré le temps de comprendre que cet amour était impossible et que l’éloignement était la seule solution viable à leur relation. Cette histoire simple qui pourrait être insipide, est au contraire prenante. Nous sommes témoins de cette relation qui se noue entre Laura et le Docteur Harvey, une relation naturelle, joyeuse, simple à travers laquelle ils se sentent pleinement vivants. Une relation à la fois heureuse et compliquée du fait que chacun d’eux est marié et attaché à son conjoint et à ses enfants. Un amour qui leur tombe dessus les prenant totalement au dépourvu au milieu de l’ordinaire sans histoire de leur vie, qui les tourmente chaque jour en pensée, qui les enferme dans le mensonge. Un amour qui n’ira jamais plus loin que quelques moments partagés et quelques baisers furtifs, arrachés aux regards des gens.
Les plans alternent ainsi entre le quotidien de Laura et les rencontres du jeudi qui se terminent chaque fois au café buffet de la gare avant l’inévitable séparation jusqu’à l’ultime séparation dont les derniers instants seront volés par la commère. Nous y retrouvons également chaque fois l’employé de gare et la tenancière toujours pris dans leurs relations de séduction qui n’avance pas et qui apporte une touche de légèreté à ce film grave.
Cette histoire d’amour impossible est porté par un jeu d’acteur très convaincant, en particulier celui de l’actrice Celia Johnson tellement naturelle et qui fait passer beaucoup d’émotions à travers son beau regard. Il se termine sur une scène où la confession muette de Laura se termine dans les bras aimants de son mari qui semble avoir deviné malgré les apparences contraires quelque chose du drame intérieur de sa femme. Un film à savourer simplement.
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le 6 juil. 2022
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