Max Pécas est surtout connu pour être le spécialiste de la comédie sexy franchouillarde débilo crétine. On lui doit notamment des titres tels que Embraye Bidasse, ça fume (1978), On est venus là pour s’éclater (1979), Belles Blondes et Bronzées (1981) ou encore la trilogie de St Tropez : Les Branchés de St Tropez (1983), Deux Enfoirés à St Tropez (1986) et On se calme et on boit frais à St Tropez (1987). Alors forcément, lorsque je vois passer un polar noir de 1985 signé Max Pécas, ça a rendu extrêmement curieux l’aventurier du cinéma que je suis. Surtout que ce Brigade des Mœurs se traine une petite réputation de film volontairement excessif, sans concession, à la limite du nihilisme. Alors je n’ai pas pu résister à l’appel et je me suis lancé corps et âme dans ce Max Pécas qui au final ressemble à un long épisode de Navarro en version Trash. Très trash même.
Bien qu’il soit essentiellement connu pour ses navetons à la plage où les boobs sont légion et les gags bien nazes nombreux, on ignore souvent que Max Pécas a commencé dans les années 60 en enchainant les polars sexy. On lui en doit une bonne dizaine, de Le Cercle Vicieux (1960) à La Peur et l’Amour (1967) en passant par Douce Violence (1962). Il va tout doucement laisser tomber la partie polar pour ne garder que la partie sexy et va se tourner vers le cinéma érotique avec des films tels que Je Suis Nymphomane (1971) ou Clade et Greta (1970). Viendra ensuite la période comédie qu’on lui connait, à base de nanars ou navets, c’est selon comment on voit les choses. Mais entre deux vaudevilles foireux à St Tropez, il nous fait donc un retour aux sources avec Brigade des Mœurs, deux ans avant sa retraite cinématographique, qui sera un échec cuisant.
Ce Brigade des Mœurs est un pur film d’exploitation, bien trash, le genre de cinéma bis que même à l’époque on ne voyait pas beaucoup en France. Il y avait bien des bobines telles que Flics de Choc (1983) de Jean-Pierre Desagnat, ou encore L’Exécutrice (1986) de Michel Caputo, plus célèbre pour sa jaquette arborant une Brigitte Lahaie au décolleté plongeant que pour le film lui-même, mais Brigade des Mœurs se démarquait des autres par son ambiance ouvertement malsaine, crue, crapoteuse, sale. Rien que la scène d’introduction met dans l’ambiance avec ces transsexuels du bois de Boulogne qui, poitrine à l’air, vont se faire dégommer par des motards à coup de fusil à pompe dans le ventre, suivi d’une scène à la morgue, où la Police vient voir les corps des trois transsexuels en question, allongés tel de vulgaires tas de viande, le sifflet à l’air, le bide ouvert. Max Pécas nous fait vite comprendre qu’on va être dans quelque chose de brutal, de frontal.
Brigade des Mœurs est un polar putassier, à la fois misogyne et vulgaire, avec un côté réac bien prononcé. Les personnages évoluent dans un univers glauque, entre prostituées, club de partouze et autre sex shop, où l’homme n’est que violence et la femme bonne qu’à exhiber ses attributs sexuels. Clairement, Pécas n’a pas perdu sa manie de coller des nibards dès qu’il en a l’occasion. Et toutes les occasions sont bonnes. Brigade des Mœurs est racoleur au possible et va assez loin dans les scènes assez hardcores. Massacre au fusil à pompe, torture au couteau, main coupée, crâne fendu au hachoir, torture au tesson de bouteille, corps qui se jettent de toits pour s’écraser plusieurs étages plus bas, impacts de balles bien prononcés, … Pécas n’y va pas avec le dos de la cuillère en ce qui concerne la violence physique et psychologique. Il n’y va pas de main morte non plus en ce qui concerne les dialogues, à l’image du reste. Petit florilège : « Je vais t’arranger tellement la gueule que même un parcmètre ne voudra pas tapiner pour toi » ; « s’il croit que je vais m’assoir sur 200 briques et me casser comme une tantouze, il se fout le doigt dans le cul » ; « Moi les émotions, ça me file le gourdin. J’ai envie de me farcir la copine de Monique ». Oui, nous ne sommes pas loin de la poésie. L’ensemble nous est balancé à la gueule par des acteurs aux fraises, dignes d’une série des années 90 de chez AB Production. On a parfois cette impression de texte récité, lorsque ça ne part pas dans le cabotinage extrême (hein Jean-Marc Maurel). La narration n’est, par moments, pas très claire, mais l’ensemble se fait suffisamment rythmé pour ne jamais ennuyer. D’autant plus que, mine de rien, la mise en scène de Max Pécas est plutôt correctement emballée. Son film est assez bien filmé, il se permet quelques effets de style sympathiques (les passages en vue subjective lors des gunfight, certains filtres de couleurs), même si les scènes de nuit sont parfois trop sombres, au point qu’on ne saisit pas toujours ce qu’il se passe réellement.
Quand Max Pécas revient au film policier sexy, genre avec lequel il a débuté, ça donné Brigade des Mœurs, un polar putassier, violent, parfois glauque, mais surtout moins nul que prévu. Et ça, c’est déjà une grosse surprise !
Critique originale avec images et anecdotes : DarkSideReviews.com