Dans la catégorie “je revois les films de mon enfance pour mieux me comprendre et économiser une thérapie”, je commence avec le long métrage de Don Bluth, "Brisby et les secrets de NIMH", sorti en 1982.
Je ne dirai pas mon âge mais la dernière fois que j’ai visionné ce film c’était en VHS, vous savez les cassettes vierges avec deux ou trois films dessus dont la jaquette a été photocopiée et du coup on se retrouve avec une vidéothèque monochrome remplie de films enregistrés les uns sur les autres ? Ou vraiment il n’y avait que ma grand-mère pour pirater comme jaja dans les années 90 ?
Vingt-cinq ans et des poussières plus tard, j’ai dégoté le DVD de Brisby au vendeur qui livre à la maison avec un sourire sur la boîte. J’ai visionné le film volets fermés pour l’ambiance, mais aussi parce qu’il est très sombre visuellement. Stylo en main, j’ai pris des notes sur mon carnet : “la musique, des frissons”, “c’est beau”, “flippant”, “le corbeau s’appelle JONATHAN”, “le rat est BG”, “flippant”, “Brisby la daronne de compète”, “pourquoi montrer ce film à des enfants” et à la fin, écrit en gros et souligné : “TOUT S’EXPLIQUE !!!”. Alors je m'explique :
Premier long métrage produit par Don Bluth, fraîchement dégagé des studios Disney, "Brisby et le Secret de NIMH" est tiré d’un livre pour enfants et raconte l’histoire d’une petite souris très courageuse, qui se plie en huit pour sauver sa maison menacée d’être détruite par les humains. Pour l’aider, elle peut compter sur un corbeau flippant, un hibou flippant, des rats flippants, dont un chef des rats très flippant, tout en évitant de se faire dévorer par un chat flippant, dans une maison flippante, bref en aucun cas je ne montrerai ce film à ma progéniture au risque de le rendre totalement flippé.
Visuellement, le dessin animé est sublime : les visuels des décors et des personnages sont extrêmement soignés. C’est ce qui rend les œuvres de Don Bluth qualitatives : il était intransigeant sur l’animation. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il a jarté des studios Disney qui à l’époque (fin des années 70) connaissait une période creuse où les dessins étaient recyclés d’un film à l’autre et ça rendait Bluth un peu zinzin, de devoir bosser à la chaîne, pour produire vite au détriment de l’histoire et de l’animation. Pour son premier long métrage en indépendant, Don Bluth a donc pris très au sérieux l’esthétique de son film, bien que sombre, mais finalement assez en vogue dans les années 80 où les films marquaient les enfants au fer rouge d’un traumatisme porté sur toute une vie (L’Histoire sans fin, Legend, Labyrinth ou encore La Dernière Licorne par exemple).
L’histoire aborde des sujets graves, tels que les tests sur les animaux pour la recherche en médecine (la scène du laboratoire m’a marquée à vie), la mort d’un parent ou encore la petitesse d’un individu face aux grosses machines (de façon littérale et imagée). On parle bien de l’aventure d’une petite souris des champs et pourtant elle adopte tous les codes de la Fantasy : magie, bataille épique, un dragon incarné par un chat (qui d’ailleurs s’appelle Dragon), héroïne “élue” par un médaillon enchanté, bref tous les ingrédients sont bien présents pour ravir les fans du genre.
Malgré une qualité scénaristique et visuelle, le film ne fonctionne pas des masses en termes d’entrées ciné, mais aura eu le mérite de taper dans l'œil de Spielberg, qui deviendra un producteur précieux pour la suite des studios de Bluth en finançant la sortie de Fievel et le Nouveau Monde.
C’est simple, en une heure vingt de long-métrage j’ai compris pourquoi je suis devenue militante pour les animaux, pourquoi j’ai eu une grosse phase gothique de 12 à 25 ans, pourquoi je voulais des rats (et j’en ai eu) et d’où venait mon obsession pour le prénom Jonathan. En voilà un DVD bien amorti, non ?