Il y a des films qui sont souvent nommés à de prestigieuses cérémonies mais qui repartent souvent sans rien. Et une fois que l'on a vu ces dit films, on se demande comment ils ont pu avoir autant de nominations alors qu'ils n'apportent rien aux paysages cinématographiques, comme si ils avaient été nommés par dépit pour venir compléter une liste. Brooklyn est de ces films là. Pas foncièrement raté mais suffisamment générique pour paraître insignifiant et dont on s'interroge encore après coup, ce que certains ont pu trouver de s'y particulier à cette histoire banale qui en plus est racontée mollement et sans finesses.
Le gros défaut du film viendra donc de son scénario tiré d'un roman de Colm Tóibín. N'ayant pas lu le livre je ne vais pas me lancer dans un travail de comparaison mais il faut reconnaître que cette histoire n'a pas grand chose à dire. Parlant de l'immigration, de la difficulté de refaire sa vie dans un pays qui n'est pas le sien pour évoluer sur un récit initiatique d'une femme qui passe à l'âge adulte, apprend à s'épanouir et tombe dans la complexité de la vie où elle s'interroge sur le bien ou le mal qu'est d'abandonné sa famille et de s'extasier dans une nouvelle vie. Prenant place dans une époque où les Etats-Unis assoit sa super-puissance, devient un pays pleins de promesses et voit la naissance de villes cosmopolites délimités par des quartiers, on nous plonge dans ce monde en pleine évolution pour nous parler de l'émancipation de la femme de manière plus intime. Cela permet de voir le destin d'un personnage à petit échelle avec ce que ça apporte de bons comme de mauvais. Au final cela ne se montre pas particulièrement excitant, le voyage initiatique du personnage est attendu et il se sent obligé de forcer du drama pour accentuer un effet tire-larmes. Dès le départ larmoyant aux bords du ridicule de l'héroïne qui "abandonne" sa famille, les événements s’enchaîneront avec prévisibilité. Même si la période à Brooklyn se montre charmante, la manière qu'à le film de faire un parallèle avec la famille resté en Irlande est grossier et lourd. Forçant le drama de manière a créer des enjeux artificielles pour plonger dans une prévisibilité grotesque dans la deuxième partie de l'intrigue qui se montre bourrées de longueurs et d'éléments agaçants dans le traitement caricatural des personnages. Tout ce qui aurait pu se montrer agréable dans la première partie du récit se voit balayer d'un revers de main par cette deuxième partie qui se voit muni d'un final plan-plan qui joue la facilité, faisant de la deuxième partie un élément totalement inutile qui était là que pour rajouter une demi-heure à l'histoire. Cette conclusion qui est accompagné d'une voix-off très cliché vient bien appuyer le fait que cette histoire n'avait rien à dire à part exposer des banalités sans incidences qui avaient été mieux traitées et avec plus d'intérêts dans d'autres œuvres cinématographiques.
Après le film peut quand même compter sur un casting exemplaire pour apporter un minimum d'intérêt. En ça c'est surtout Saoirse Ronan qui illumine l'écran de toute l'intensité, la justesse et la pudeur dont elle est capable. Elle est ici absolument parfaite de subtilité et de complexité pour élever son personnage, lui apportant un grâce qui n'est pas forcément sur le papier, et porter le film sur ses épaules. Elle est accompagnée d'acteurs tout aussi talentueux mais moins mis en avant comme Emory Cohen, Domhnall Gleeson et Jim Broadbent qui sont tout trois impeccables mais on aura plus tendance à retenir Julie Walters qui est excellente dans son rôle un peu bourru.
La réalisation est plutôt bien sentie, même si le tout se montre très académique et linéaire notamment sur le montage et la technique. Mais l'ensemble est appuyé par une photographie élégante qui rend les plans assez joli et d'une musique suffisamment discrète pour ne pas être agaçante durant les moments tire-larmes. La mise en scène de John Crowley est classique dans tout ce que cela peut avoir de positifs et de négatifs. Le fait qu'il n'essaye pas d'en faire trop sert plutôt bien le côté minimaliste de l'histoire et permet d'avoir une rendu classieux et maîtrisé. Mais le fait que la mise en scène semble totalement détaché du reste donne au film un coté froid et impersonnelle, n'impliquant jamais le spectateur qui reste de marbre devant cet abattage sans subtilités d'émotions. Ce qui fait que l'ensemble flatte la rétine et dispose d'une reconstitution d'époque impeccable mais cela souligne une certaine platitude qui nous plonge dans un ennui poli.
En conclusion Brooklyn est une oeuvre sans incidences et empli de banalités qui se montre au mieux mignonne mais sans envergure et au pire totalement ridicule et forcée. L'ensemble offre donc un résultat que l'on qualifierais de pas terrible, car il y a une certaine maîtrise visuelle et un casting suffisamment fort, notamment Saoirse Ronan qui est prodigieuse, pour que l'on ne tombe pas dans quelque chose de mauvais. Néanmoins on se rend très vite compte qu'il n'y a pas grand chose à raconter ici, où que ce que le film montre, d'autres l'on fait avec plus d'intelligence et de maîtrise. Ici on est face à une oeuvre académique et tire-larmes, qui ne mise que sur du sentimentalisme grossièrement amené pour exister. Rien de mémorable ou de digne d'être vu donc.