L’art, on le sait, pose davantage de questions qu’il n’apporte de réponses : c’est, par la magie du récit, les ornements de l’esthétique et la vibration des sentiments, une façon de sublimer les interrogations qui font de nous des êtres humains. Certaines œuvres peuvent ainsi vous troubler au point de vous accompagner longtemps après le visionnage, spectre qui refusent de se taire et emprisonnent vos certitudes.
Brutus vs Cesar appartient à cette catégorie, et génère un tel nombre de questions qu’on en oublie de rire.
Kheiron, c’était pas un gars qui avait un vrai talent d’impro, de l’humour et un sens de la répartie ?
Le dab, c’était pas genre y a des années ?
Ils peuvent pas, ils ont piscine, c’était pas genre il y a des décennies ?
Les anachronismes pour faire rire, (clapping, un sénateur qui dit « arrête de forcer », c’est pas devenu anachronique ?
La musique de jeu vidéo pour enfants de moins de 6 ans, c’est pour séduire le jeune public ?
La musique des spectacles du Puy du fou pour l’epic touch, c’était aussi de la parodie ?
Les clips sur les montagnes gauloises, c’est pour favoriser le tourisme national en temps de pandémie ?
La potion qui fait bander, c’était… quoi en fait ?
Le kung-fu au ralenti, ça se prenait pas au sérieux ?
La romance et les odes à la tolérance, l’éloge de la diversité, c’était pour caster les potes ou faire du politiquement correct, ou les deux ?
Le cacheton des patriarches (Darmon, Lhermitte, Richard), c’est une caution public Ehpad, un hommage ou une humiliation ?
Mission Cléopâtre, ils l’ont jamais vu et on les excuse d’avoir eu les mêmes idées en pas bon, ou bien ?
Les nouvelles aventures d’Aladin, de Cendrillon, la Véritable Histoire de Robin des bois, c’est encore un business model pour la comédie française ? Personne leur parle ?
Est-ce qu’on doit attendre de voir la réaction du public pour se rendre compte qu’on n’est pas drôle ?
Est-ce que la décision par UGC de sortir le film sur Prime est un impératif sanitaire ou une solution à un embarras ?
Est-ce que la réplique de Kheiron « Putain mais qu’est-ce que je fous là » était dans le script, ou est-ce un cri du cœur ?
Belle leçon d’humilité au cinéphile : la route est longue, petit scarabée, et les questions incessantes. La comédie française reste cette nébuleuse opaque, aux voies impénétrables.