Oublions un peu la Musique - formidable, on le sait - des vétérans cubains du "Buena Vista Social Club" et parlons ici de... Cinéma, car c'est bien de cela qu'il s'agit, après tout, non ? On sait que Wenders - cinéaste que nous portions aux nues dans les années 80 et 90 - s'aventurait à l'époque régulièrement dans le genre documentaire, avec des résultats pour le moins variables. Pourtant, rien de cette "pratique" ne transparaît vraiment dans ce "BVSC - le film", qui s'avère une sorte de degré zéro du documentaire ! Car qu'avons-nous vraiment ici ? Des images - nouvelles à l'époque, il est vrai - d'une La Havane décrépite, réduite à néant par des années de stupidité communiste ; des conversations superficielles avec d'anciens héros de la géniale musique cubaine, que Wenders prend bien soin d'arrêter avant que l'on attaque vraiment les sujets qui fâchent - politiques, sociaux - sans doute (espérons-le...) pour ne pas causer du tort aux musiciens, et qu'il filme comme le ferait un Lelouch, avec une caméra qui n'arrête pas de tourner et de virevolter ; un concert - en Europe - filmé de manière totalement académique, sans que jamais la chaleur et l'émotion si caractéristiques de cette musique ne transparaissent à l'écran. La lacune la plus criante du film est, et c'est un paradoxe douloureux, l'absence complète d'une réflexion sur le FOND (les thèmes, les sujets, les origines, fondamentalement la RAISON D'ÊTRE...) de la musique soit disant célébrée ici ! Bref, Wenders prouve ici : 1) qu'il ne sait pas regarder - 2) qu'il ne sait pas écouter - 3) qu'il n'a pas compris le Sens derrière la Musique. Si l'on ajoute que les plus chicaneurs d'entre nous trouveraient facilement un certain "colonialisme" dans le regard jeté sur le projet BVSC, que ce soit à travers le rôle "central" de Ry Cooder et son fils, ou même dans la commisération avec laquelle Wenders filme les pauvres vies des musiciens, on a un film certes commercialement porteur - et qui a connu un beau succès - mais sans aucune validité intellectuelle ni artistique. [Critique écrite en 2016]

EricDebarnot
3
Écrit par

Créée

le 17 mai 2016

Critique lue 945 fois

5 j'aime

2 commentaires

Eric BBYoda

Écrit par

Critique lue 945 fois

5
2

D'autres avis sur Buena Vista Social Club

Buena Vista Social Club
Meige
7

Si vous êtes fan de Buena Vista Social Club ou Wim Wenders

On se dit que c'est génial, parce que Buena Vista Social Club, le groupe, c'est génial. Mais en essayant de repenser au film pour lui même, je me dis qu'il n'est pas si intéressant. Quelques idées de...

le 18 janv. 2017

6 j'aime

Buena Vista Social Club
Charlouille
9

Critique de Buena Vista Social Club par Charlouille .

L’été approche malgré le temps maussade qui surplombe les plaines. Une odeur de rhum commence à revenir au creux des narines, bercée par les aromes d’un citron vert tout juste pressé auquel on a...

le 1 juin 2013

6 j'aime

Buena Vista Social Club
EricDebarnot
3

Parlons Cinéma !

Oublions un peu la Musique - formidable, on le sait - des vétérans cubains du "Buena Vista Social Club" et parlons ici de... Cinéma, car c'est bien de cela qu'il s'agit, après tout, non ? On sait que...

le 17 mai 2016

5 j'aime

2

Du même critique

Les Misérables
EricDebarnot
7

Lâcheté et mensonges

Ce commentaire n'a pas pour ambition de juger des qualités cinématographiques du film de Ladj Ly, qui sont loin d'être négligeables : même si l'on peut tiquer devant un certain goût pour le...

le 29 nov. 2019

205 j'aime

152

1917
EricDebarnot
5

Le travelling de Kapo (slight return), et autres considérations...

Il y a longtemps que les questions morales liées à la pratique de l'Art Cinématographique, chères à Bazin ou à Rivette, ont été passées par pertes et profits par l'industrie du divertissement qui...

le 15 janv. 2020

191 j'aime

115

Je veux juste en finir
EricDebarnot
9

Scènes de la Vie Familiale

Cette chronique est basée sur ma propre interprétation du film de Charlie Kaufman, il est recommandé de ne pas la lire avant d'avoir vu le film, pour laisser à votre imagination et votre logique la...

le 15 sept. 2020

190 j'aime

25