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Dans le musée monumental de l’histoire du cinéma, Buffet Froid a droit à sa place, voire sa propre salle. Par sa singularité de ton, sa plastique irréprochable et son expérience de l’absurde, ce film est indispensable.
Le récit, profondément déconcertant, procède sur l’annihilation : des quêtes, de la logique, du rythme lui-même. Accumulation de saillies à l’autonomie propre, il déploie les méandres de situation systématiquement abordées par l’inversion de nos attentes.
En découle bien entendu une comédie, féroce et jubilatoire. On flingue comme on baise, on s’épaule comme on se trucide. Les comédiens sont exceptionnels, les dialogues sublimes : au fil de situations improbables jaillissent des aphorismes aussi hilarants que savoureux, où l’on torture avec de la musique de chambre, on fustige les mérites de la nature et l’on prête main forte à un serial killer pétochard.
Le film ne se limite pas à une comédie fantaisiste. L’acidité et l’humour noir prennent aussi le pas sur les caractérisations classiques et vont jusqu’à contaminer le décor. Urbain dans sa première partie, dès la majestueuse ouverture dans le métro, les prises de vues témoignent d’un souci maniaque du cadrage, et parcourent un quartier de la Défense encore inhabité, et d’autant plus inhumain. La ville est un chantier désert où les cadavres s’accumulent, une tour vide où l’arrivée d’un nouveau locataire inquiète davantage qu’elle rassure. Fidèle à sa logique, Blier destituera toutes les voies possibles de réconciliation avec le monde : la foule est inhumaine (soit les morts vivants de l’aristocratie face à la musique de chambre, soit les soldats sans cervelle de la police qui investit l’immeuble) et la nature inconfortable.
Le final, absolument mémorable, renvoie chaque personnage aux coulisses d’une comédie morbide, et se paie le luxe ahurissant d’un semblant de cohérence en revenant sur les débuts du film par l’intervention de Carole Bouquet, fille du Michel Serrault du prologue.
Les prises de vue sur le viaduc, le turquoise de l’eau contrastant avec le rouge de la barque, le visage de Carole Bouquet, enfin : Blier l’affirme haut et fort, il nous a submergé.
Sergent_Pepper
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le 15 août 2014

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Sergent_Pepper

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