L'adrénaline, vous savez, cette sensation mystique ressentie en situation incongrue? L'endorphine après un gros coup dans la gueule ? Bullly, c'est ça, et Larry Clark, c'est lui, le type qui m'a pas raté (c'était notre première rencontre en plus, goujat !).
Sorti en 2001, le film éponyme relate l'histoire, particulière, et même extravagante, d'un groupe de jeunes américains totalement désaxés et dépravés se mettant en tête de commettre le meurtre d'un de leur pseudo-camarade, Bobby, un garçon violent, acerbe, pervers, narcissique et tout l'arsenal du type détestable. Autant de motifs qui n'auront de cesse d'alimenter la soif de vengeance de son entourage, plongeant le spectateur dans une tension atmosphérique, une descente aux enfers surréaliste mais pourtant bien réelle.
Merveilleusement bien joué par ces acteurs en herbe, Bully nous transporte dans la folie juvénile de cette jeunesse américaine, désorientée et béotienne, commettant sans empathie les pires vices en plan rapproché, avec, malgré tout, une petite touche de naïveté. Et c'est là-dessus que le film est fort. À peine formés, maladroits en amour, ankylosés intellectuellement, peu habiles sexuellement, qui ne pourrait s'identifier à cet « âge bête » , à ce petit con fumant de l'herbe au skateparc entre deux heures de colles (cliché, moi?)? Voilà ce qui dérange dans ce film ; la souillure, brute et crue, d'une jeunesse prépubère. Loin d'être des tueurs nés (d'ailleurs, qui l'est?), ces adolescents ne sont que les produits de leur monde. Sans frontière, sans repère, sans réprime, vivants dans l'incompréhension la plus totale, ou plutôt dans l'ignorance, ce film met en image l'équation logique et inévitable de cette liberté destructrice, de ce conditionnement à la destruction. Je ne pus d'ailleurs, contenir un léger sourire plein de sympathie face aux dernières minutes du film, fortes en symbolique ; une chamaille enfantine avant le jugement dernier, sous le regard désabusé et sentencieux des juges et des parents.
Sur un fond de rap US, de drogues, de sexe, de viols, de violence et après une bonne lampée de situations burlesques, il est alors à s'arracher les cheveux de voir la mention « tirée d'une histoire vraie » sur le boîtier! Une question me trotte dès lors dans la tête ; dans le fond, qu'est ce qui est déroutant ? L’œuvre, ou le modèle ?