Le début du film est très réussi. On y découvre un down complètement différent de celui interprété par Tim Curry. Bon, je ne reste pas très fan du nouveau design de Ça. Celui du téléfilm est visuellement plus marquant avec ses lèvres trop fines et son sourire « à l’envers ». Les couleurs vives et criardes de son costume sont agressives. En revanche je déteste sa voix originale : on dirait un vieil ivrogne sadique ! Du coup je le préfère en VF car sa voix est surnaturelle et bien creepy !
Si la nouvelle version de Ça m’a séduite, c’est grâce au talent de son interprète. J'ai vraiment adoré ce qu'il a fait de son perso : un taré vicelard pleins de tics qui parle tout speed d’un coup puis ralentit son flot de parole, creepy ! Il m’a fait délirer ! En particulier dans la première scène. Et quand il se trouve tout près d’un gosse, il a de la bave qui coule et il les renifle, détails dégueulasses très appréciables car il ne faut pas oublier que c’est une dévoreuse basiquement.
Du coup, là où ça pêche lorsque Ça se manifeste − à savoir avec un poil trop de CGI abusés et répétitifs qui gênent mon processus de suspension d’incrédulité − c’est bien rattrapé par le jeu de Bill Skarsgård qui offre à son personnage une dimension aussi réaliste que bizarre.
Je reviens rapide sur ces fameux effets spéciaux numérisés. Andrés Muschietti a une vraie patte poétique, il sait raconter une histoire et accrocher son public. Il fait définitivement du bon boulot avec les enfants qu’il dirige (Mama inclus) et ses films aux allures de contes de fée horrifique sont d’une grande beauté et d’une sensibilité qui me touchent profondément. Mais putain faut qu’il freine un petit peu sur les CGI, c’est tellement gros comme une maison !
Le Ça de Tommy Lee Wallace, lorsqu’il ouvrait sa gueule en mode je vais te dévorer, on avait plus d’authenticité grâce aux techniques plus anciennes mais qui permettent à l’acteur de rester physiquement présent dans sa performance.
Je pense que Muschietti devrait faire plus confiance en son acteur, en sa propre imagination et surtout en son public pour que la magie opère. C’est trop facile de s’en remettre systématiquement à de super FX qui coûtent bien cher pour en mettre plein les yeux. D’ailleurs, le voir courir à toute vitesse en direction de la caméra, ça aussi ça va cinq minutes.
En résumé, moi qui avais quelques a priori vis à vis de Bill Skarsgård (trop mignon, trop jeune), je kiffe sa performance mais je suis restée sur ma faim. On ne le voit pas assez ce putain de clown ! Et ses scènes sont trop rapides. Parce que sérieusement, il m’a fait rire et il a su se réapproprier un personnage que nombre de fans (dont moi) déclaraient ne pouvoir être joué que par le grand Tim. Les deux Ça sont intéressants et creepy à leur manière :)
Après, je vais pas cracher sur tous les CGI du film, je serai de mauvaise foi. La dame du tableau est sympathique, le lépreux (je l’attendais et je l’ai eu !!) a une bonne sale gueule. La scène du projecteur est plutôt énorme, celle dans la cave avec Georgie pareil. Mais par exemple le lépreux, avec un excellent pro du maquillage (pourquoi pas vous payer Savini, votre budget vous permet grave de vous offrir la crème les mecs !), il pouvait être encore mieux qu’il ne l’est déjà ^^
Et puis faut dire la vérité, IT nouvelle version est vachement plus généreux en gore et en cela, cette adaptation est déjà plus fidèle au roman que son prédécesseur. Les gosses s’en prennent plein la gueule et plein les yeux par rapport à ceux de la version 90. La fameuse scène de la salle de bain, l’arrachage du bras de Georgie, oh yeah ! Je regrette qu’une fois de plus l’oiseau géant vu par Mike et les sangsues qui dézinguent Patrick Hockstetter dans le livre n’aient pas été portés à l’écran :( surtout l’oiseau ! C’est tellement dérangeant comme passage, ça aurait pu déboîter dans le movie…
Muschietti a l’avantage sur Tommy Lee Wallace d’avoir su nous montrer le côté dramatique de l'histoire des enfants, ce n’est pas juste une histoire de monstre. Mais pourquoi n’avoir pas tenté l’exercice jusqu’au bout ? Le traitement de ses personnages est trop inégal.
Les jeunes acteurs assurent, y a rien à dire ! Ils sont très naturels et attachants. Par contre, ils sont sacrément badass par rapport à l’ancien casting ! A défaut de dire « Beep beep Richie »✣, on a droit à des « Shut the fuck up » et autres blagues sous la ceinture super rigolotes (Finn Wolfhard devait être content d’avoir le droit d’être grossier comme ça). Et puis je les trouve plus blasés par rapport aux apparitions de Ça. Même dans leur drame personnel à chacun, leur manière de se comporter et de réagir aux événements donne une image plutôt forte d’eux. Pas tout le temps heureusement mais vachement plus que les enfants de la version 90. Surtout Beverly. L’ancien casting fait plus enfantin (regardez leur bouille toute chou à chacun) tandis que le nouveau, bah on voit clairement que les gosses sont des ados. Ils ont pratiquement tous 14-15 ans. Sauf que l’ancien casting avait dans les mêmes âges à l’époque ! C’est intéressant de voir comment évoluent physiquement les générations, non ?
Bref, je reviens sur Beverly. J’aime beaucoup la nouvelle, très fraiche, naturelle et qui rayonne. Un petit soleil ! Mais Emily Perkins avait ce petit visage très triste et très mignon qui allait bien avec le personnage de Beverly. Du coup, même si j’apprécie énormément ce qu’a fait Sophia Lillis de son personnage, je vais me garder une petite préférence pour Emily.
Ceux que j’ai préférés sont Ben et Eddie. Mais là encore, le nouveau Ben semble plus « armé ». Malgré son complexe et sa gaucherie, il est très enjoué. Ben a touché ma corde nostalgique avec toutes ses références aux NKOTB. Moi aussi j’étais super fan (c’est d’ailleurs le seul boys band que j’ai aimé), du coup ses petites blagues avec Beverley m’ont fait sourire ;)
Quant à Eddie, le jeune Jack Dylan Grazer a fait du superbe boulot pour mener son personnage aux dernières frontières de l’obsession ! La mère Kaspbrak a complètement déteint sur lui, encore plus que dans le livre ! Eddie s’est fait rincer le cerveau par sa vieille au point d’en devenir un obsédé de la saleté et des microbes et dans le film, presque chacune de ses paroles portent sur la maladie, les accidents blablabla. Trop marrant, d’autant que Richie se fait un plaisir de l’asticoter à chaque fois.
Richie est génial. Déjà remarqué dans Stranger Things, Finn Wolfhard joue cette fois-ci sur un registre humoristique. On lui a donné les meilleures punchlines ! Vraiment il assure. J’ai eu d’abord un peu peur qu’on lui ait accordé le rôle de Bill, genre privilège de la célébrité et ça aurait été dommage de lui faire jouer un autre rôle dramatique (si vous vous demandez comment ça se fait que j’étais pas trop au courant du casting, oui j’ai fait en sorte de ne voir aucun trailer et d’en savoir le moins possible pour avoir la grosse surprise). Nouvel exercice de style fort réussi jeune Wolfhard !
Les trois personnages qui sont trop restés en arrière…bah c’est le reste de la bande : Stan, Bill et Mike. Pour le premier, ça va encore. Stan est quelqu’un qui refuse longtemps de croire en la magie de Ça et c’est pour cela qu’il sera le plus traumatisé du club et qu’il évitera de revenir à Derry en se foutant la gueule en l’air. Il a son importance, mais elle est moindre par rapport aux autres membres.
Ce qui m’a vraiment fait chier par contre, c’est Bill. Son personnage n’est pas assez développé et trop effacé. Alors qu’il est censé être Grand Bill, le chef ! Je n’ai d’ailleurs pas compris l’intérêt de faire de Georgie un disparu et non plus un mort. Je comprends encore moins (mais ça doit être lié au premier choix) pourquoi on ne voit pas (ou peu) ses parents. Dans le livre, Bill culpabilise parce que ses parents font en sorte qu’il le fasse. Il n’existe plus pour eux et Bill en souffre.
Le pire gâchis ? Encore une fois c’est Mike. Il arrive encore plus tard que dans le téléfilm mais c’est pas pour autant que le scénario prévoit de bien raconter son histoire, ô combien intéressante pourtant ! D’autant que son drame personnel, c’est la peur panique d’Henry Bowers et de son vieux. Je reviens sur Henry après, cher lecteur, restons un peu avec Mikey. Ceux qui ont lu le bouquin seront d’accord pour dire que Mike est un des personnages les plus importants du roman. Il a même l’honneur d’être le narrateur quelquefois ! C’est lui le plus documenté à propos de l’histoire de Derry, pourquoi avoir confié cette tâche à Ben à présent ? Dans la cérémonie de la petite fumée, c’est lui qui tient le plus longtemps avec Richie. C’est quand même lui qui garde le phare bon sang ! Encore une fois, il est laissé en arrière et on le voit pas beaucoup. C’est dommage car son interprète Chosen Jacobs a du potentiel. Le fait d’avoir complètement changé son histoire, ça c’est pas si grave, pourquoi pas ? Mais comme je l’ai dit plus haut, j’attendais l’oiseau, un de mes passages préférés du bouquin.
Du côté des méchants, Bowers et sa bande, j’ai trouvé le dossier bien faible. J’attendais, et je sais que je ne suis pas la seule, Patrick Hockstetter. Ce petit psychopathe répugnant avec sa mort putain de méritée ! Y a pas eu grand-chose à se mettre sous la dent.
C’est Bowers qui m’a le plus frustrée. Une fois de plus, le film n’en a strictement rien à foutre de son drame personnel. Ok, on a laissé le nouveau Bowers être beaucoup plus violent, à l’image du perso papier mais quid de son drame ? Y a bien une pauvre tentative lorsque le père lui fout les jetons et la honte devant ses potes mais ça reste limité. J’aurais voulu que soit porté à l’écran le vieux Bowers alcoolo et violent qui a élevé son fils à coup de savates et de lavages fréquents du cerveau. Ça permet de comprendre pourquoi Bowers devient de plus en en plus extrême et incontrôlable et pourquoi il est facile pour Ça d’en faire sa marionnette. C'est pas juste un méchant, c'est plus que cela.
Même si je déplore le manque de profondeur de certains des personnages, tous les acteurs font le boulot et bien plus encore. Comme dans Mama, Muschietti a eu le nez très fin pour son casting, adultes y compris.
En voilà un de super bon point pour le réalisateur argentin ! Il a eu la volonté de nous montrer le côté très inquiétant des adultes, certainement par fidélité au roman, mais peut-être pas que, si on se souvient de Mama. Et son arme suprême est le choix de ses acteurs. A commencer par la mère d’Eddie. Jouée par Molly Atkinson, c’est une dondon au visage d’ogresse prête à dévorer son fiston. Ce qu’elle fait psychologiquement. En voyant Eddie, on voit qu’elle lui a sucé la personnalité pour y mettre la sienne.
Le père de Beverly, Al Marsh alias Stephen Bogaert est passé du père violent à l’incestueux, ce qui accroit encore plus le malaise lorsqu’il se retrouve seul avec Beverly. Décidément, le paquet a été mis sur le seul membre féminin du club. Mais ça sert bien le scénario, l’horreur qu’on suppose qu’elle subit la blinde à mort (vous avez noté comme elle ne se laisse jamais démonter par personne en dehors de chez elle ?) et se retrouve être la première qui n’a plus peur de Ça, la plus forte donc.
C'est un conte de fée plus qu'un film d'horreur...et c'est très bien ! Avec seulement deux films à son actif, les intentions de Muschietti sont déjà très claires : il ne veut pas faire peur. Il veut raconter un conte dans lequel il utilisera des éléments horrifiques. Ça ne manque pas de sens, les contes de fée abritent toutes sortes de créatures fantastiques étranges. En plus, si vous vous souvenez de ceux que vous avez lus enfant, vous admettrez qu’un conte c’est violent voire gore ! Une des belles-soeurs de Cendrillon qui se fait couper un morceau de pied par la vieille pour avoir une chance de se faire épouser, on est dans les prémices du torture-porn, le Saw de l’époque : sacrifie-toi pour te marier ou bien ta vie est finie (socialement). Ou le loup du Petit Chaperon rouge qui dans la version happy end se fait ouvrir le ventre sans anesthésie. Hardcore !
Je fais d’abord un crochet par Mama. Pour moi ce n’est en aucun cas un film d’horreur. Mama me rappelle les contes fantastiques que j’ai vus enfant, comme Legend ou L’histoire sans fin. On y rencontre de drôles de créatures à l’allure parfois inquiétante mais cela reste des histoires faites pour les enfants avec le plus souvent des gosses qui campent les héros. Et cette poésie, cette sensibilité, cela aussi fait partie du squelette du conte. Je dis pas qu’un film d’horreur peut pas posséder ces deux qualités, mais ce n’est pas une constante.
Dans Ça, Muschietti reprend les mêmes ingrédients mais il va avoir le bon goût de changer les quantités. Le public attend un max de scènes d’épouvante. Sinon on tombe dans le drame simple.
Ça, c’est l’ogre des contes qui mange les enfants. Le voir régulièrement montrer tous ses crocs, baver et renifler ses proies ne fait que me conforter dans l’idée que Muschietti nous as pondu un conte horrifique et non un film d’horreur. Et la mère Kaspbrak qui vient renforcer cette image.
Et puis il y a la magie. Il ne l’a pas oubliée heureusement, quoiqu’il aurait pu plus l’utiliser en étant un poil plus fidèle au bouquin à certains moments. Ça ne peut être vaincu que si l’on croit que la magie existe. Outre l’amitié qui les unit et les rend fort, le club des Loosers doit absolument croire parce que Ça lui-même croit. En fait, le point faible et le point fort principal des deux camps est le même : la magie peut te faire gagner comme elle peut se retourner contre toi.
J’ai vu une critique sur Youtube qui disait que c’était nul que Beverly soit propulsée en demoiselle en détresse qu’on doit aller sauver. Bon ok, c’est peut-être pas le schéma narratif le plus original qui soit. Il n’empêche que j’ai bien aimé que Ben croie que s’il l’embrasse elle reviendra à la vie…et que ça marche !
Le roman utilise volontiers des éléments de contes de fée, il ne faudrait donc pas penser que Muschietti a imposé sa seule volonté. Simplement, il propose d’autres idées, malheureuses ou non, à vous de juger.
Je regrette cependant que le loup-garou ait été tout bonnement dégagé du tableau. On a bien le passage Neibolt Street mais sans sa bestiole. Dans le livre, c’est la première victoire de la bande contre Ça. Justement en le bluffant. C’est là qu’ils réalisent qu’ils peuvent vraiment le vaincre tout simplement en croyant.
Dans le film, Neibolt Street devient un laborieux combat dans lequel les gamins laissent quelques plumes et qui ensuite les sépare les uns des autres. Je ne critique pas ce changement de l’histoire, il est intéressant à sa manière. Mais c’était l’occasion de rajouter plus de magie et bien faire comprendre au public que c’est essentiel à la survie des gosses.
Au final, j’ai passé un excellent moment devant cette relecture de Ça. C’est divertissant, très bien interprété et j’ai hâte qu’il sorte en BR. C’est vrai que je lui reproche quelques éléments mais franchement, ça ne m’a pas gâché le plaisir pour autant.
Plus je regarde le téléfilm, plus je me dis que pratiquement tout repose sur les seules épaules de Tim Curry. L’histoire est amputée et délavée pour être grand public. Il y a plus de choses à reprocher à cette version qu’à la nouvelle qui elle au moins, a le souci de creuser plusieurs aspects, quitte à risquer de nous mettre mal à l’aise ou sursauter…c’est selon !