Cabu, Charb, Honoré, Tignous, Wolinski ne témoignent pas dans le documentaire Caricaturistes, fantassins de la démocratie et pourtant face aux tristes événements de la semaine dernière, en visionnant cette œuvre, on ne pense qu’à eux… On ne pense qu'à leur génie, leur courage, leur impertinence, leur humanité. Sorti en mai 2014, le long métrage brosse le portrait de 12 caricaturistes originaires du monde entier qui défendent, à la seule force de leur crayon, la liberté d'expression et la démocratie. Ils sont français, tunisiens, russes, mexicains, américains, burkinabés, chinois, algériens, ivoiriens, vénézuéliens, israéliens, palestiniens et témoignent pour certains (notamment en Russie ou en Tunisie) de leurs démêlés avec le pouvoir dans des pays où la liberté de la presse est loin d'être effective. Sur la forme, le documentaire est construit classiquement (un entrelacement des interviews des 12 caricaturistes), une sobriété qui permet de mettre en lumière toute la force des propos de ces trublions virtuoses. Ce documentaire simple mais indispensable met surtout en évidence que, quel que soit le pays, les caricatures dérangent les puissants et font de ces dessinateurs engagés des héros de la liberté. Merci à eux d'exister.
Zoom sur… Ces cinéastes luttant pour la liberté d’expression
Ils s’appellent Jafar Panahi, Bahman Ghobadi, Lou Ye, Ossama Mohammed, ils sont iraniens, chinois, syriens et parce qu'ils osent s'engager contre le pouvoir dans leurs œuvres, ils doivent combattre chaque jour pour exercer leur métier. C'est ainsi que Lou Ye réalise en 2006 sans l'aval des autorités Une jeunesse chinoise qui évoque la répression du printemps de Pékin en 1989. Ce manquement lui vaut une interdiction de tournage pour plusieurs années mais le cinéaste brave la censure et tourne clandestinement en 2009 Nuit d'ivresse printanière (sur un autre sujet tabou en Chine : l'homosexualité). Le film sera sélectionné à Cannes tout comme l’œuvre de Bahman Ghobadi réalisée secrètement en Iran : Les chats persans (qui décrit la violente répression qui s'abat sur la jeunesse iranienne). Le cas du cinéaste Jafar Panahi est, quant à lui, des plus préoccupants, ce dernier alternant séjours en prison et assignations à résidence pour ses longs métrages dénonçant la condition de la femme et l'absence de liberté en Iran. Interdit de travailler et de quitter son pays, il réalise chez lui en 2011 Ceci n'est pas un film exposant sa situation. Le long métrage stocké sur une clé USB cachée dans un gâteau réussit tout de même à être envoyé et présenté au festival de Cannes 2011. Ces cinéastes, au courage sans nom, témoignent ainsi de l'incommensurable pouvoir de la liberté d'expression, qui toujours triomphera face à l'obscurantisme.