C'est un film beaucoup plus compliqué qu'il n'y paraît. Parce qu'il y a Cate Blanchett, déjà, qui est comme d'habitude si belle qu'elle ne paraît presque pas humaine. Mais d'où vient donc ce visage, si puissant, si étrange ? C'est indiscernable, et dans Carol, c'est toujours très discrètement, par quelques gestes jetés au fond de la convenance, que l'indiscernable infuse. Chez Todd Haynes, la révolte est dans la nuance, la fièvre est dans le murmure, dans les yeux d'une actrice - ces yeux qui s'installent sur Thérèse pour ne plus la lâcher. C'est toujours avec élégance, mais une élégance qu'on pourrait aussi nommer rage, que le cinéaste nous émeut. Rage parce que cette élégance n'est pas refus de l'engagement. Ce que le film raconte, et ça va très loin, ce n'est pas tellement l'affirmation d'une identité, mais plutôt celle de l'être. Et le film se pose dans ce basculement vers l'être, cette chance, finalement, qu'ont eu Carol et Thérèse d'avoir pu commencé à exister ensemble. Comme dans cette scène où, affirmant assumer son histoire avec Thérèse, Carol lance à son mari, les yeux plein de larmes : "je sais que nous ne sommes pas des monstres" qui sonne comme une prise de conscience soudaine. Ce saut dans l'interdit donne à Carol enfin le sentiment de savoir qui elle est, et surtout, et c'est la beauté du film, qui sont aussi les autres.
J'ai trouvé le film beau, ambivalent et beau. Maintenant, là, tout de suite, j'aurai aimé que formellement, tout cela déraille un peu plus. Qu'il y ait un peu moins de beaux plans perçus comme tels, un peu moins de petite musique, et surtout, un peu moins d'encadrements de porte.

B-Lyndon
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le 23 janv. 2016

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B-Lyndon

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