L’Œil du Tigre

Dans le registre des suites que personne ne voulait voir, Pixar y vont fort depuis quelques temps. Leur Line-Up jusqu'à 2019 est en effet intégralement composé de reprises de franchises à l'exception de Coco, qui sortira en Novembre 2017. L'année 2016 a marqué le retour en demi-teinte du Monde de Nemo et nous nous apprêtons à avoir très bientôt ceux des Indestructibles et de Toy Story en 2018 et en 2019. Mais avant cela, une autre licence revient au cinéma, à la fois la plus détestée et la plus rentable de Pixar Animation Studios, Cars.

Prévu au départ pour 2019, le projet est finalement et mystérieusement avancé à 2017 mais dirigé cette fois-ci par Brian Fee, storyboarder chez Disney et Pixar, et non plus John Lasseter. Mission risquée pour ce jeune inconnu au bataillon dont c'est la première réalisation. Parvenir à relever le niveau de la franchise Cars après le massacre incompréhensible effectué par Lasseter en 2011 et arriver à attirer fans comme nouveaux venus dans ce qui est normalement le dernier volet de la trilogie.

Bien qu'il ait défendu Cars 2 (ou plutôt son existence) 6 ans plus tôt, John Lasseter reconnaît son échec en ne faisant jamais mention du deuxième film, c'est comme s'il n'avait jamais existé! Éloignant Martin le plus possible du champ d'action, Brian Fee recentre comme il le devrait l'histoire sur Flash et redonne le côté intime et personnel pour lequel avait opté avec raison John Lasseter en 2006.

Cars 3 emprunte beaucoup à la conclusion de Toy Story dans l'idée de revenir aux fondamentaux de la saga en amenant la peur de rejet du héros évoquée dans le premier film pour en faire l'enjeu dramatique principal du troisième chapitre, vendu dès ses débuts comme un sort inévitable. Tout le pari va être de revenir en force et pour se faire, Flash trouve la motivation en son entraîneur, Cruz Ramirez, nouveau personnage drôle et touchant faisant le pont avec l'époque de Flash. Cars 3 est si on veut l'équivalent de Rocky 3.

Le rapprochement avec le premier film aurait pu jouer en la défaveur de ce troisième volet. Cars, Quatre Roues ayant déjà montré que Flash apprend la victoire dans la défaite, cette suite ne pouvait avoir qu'une seule issue pour ne pas répéter le même final de façon similaire à Rocky 2: La Revanche puisque l'on reste dans la comparaison. Et même là, Pixar déjouent tous les pronostics dans une fin pleine d'humilité faisant honneur à leur nom et nous rappelant combien ils sont objectifs quant à l'idée que Flash ne peut pas vaincre le temps, uniquement apprendre de lui.

On ne pouvait souhaiter leçon de vie plus pixarienne que celle de Cars 3. Le studio a toujours autant de choses à nous apprendre sur l'écart intergénérationnel qui a fait leur patte depuis leurs débuts. Cela passe notamment par une visite des coins reculés de l'Amérique (la participation au derby de démolition, la rencontre des vétérans à Thomasville), un très bel hommage à Paul Newman réparant son retrait bâclé de Cars 2, une bonne utilisation des personnages de Cars, Quatre Roues (Chicks Hicks devenu présentateur) et un message solide sur la traversée du temps (les sponsors se servant de l'image de McQueen pour l'exploitation en produits dérivés).

Il y a fort à parier que The Walt Disney Company sera tentée tôt ou tard de poursuivre l'aventure, Cars ne trouvant son succès que dans les gammes de jouets, mais cette entreprise ratée s'étant déjà exprimée à travers la duologie Planes et l'arrêt des suites ayant été officialisé par Jim Morris, président des Studios Pixar, nous sommes potentiellement à l'abri d'un Cars 4. Et il faut s'arrêter maintenant. Cet univers a enfin retrouvé son honneur dans un dernier acte sincère et émouvant. Le meilleur de la trilogie.