Le combo de base Scott + McCarthy a de quoi émoustiller quelques fans apparemment. Personnellement, la présence de Cormac McCarthy au scénario, comme présenté fièrement dans toute la promotion du film, m'a fait pensé à Frank Miller qui s'essayait lamentablement au cinéma. L'impression de voir un mec talentueux dans son domaine arriver sur un autre medium et penser qu'en faisant la même chose ça passera crème.
En l'occurrence, Cartel est totalement consternant. Son pitch de base à la simplicité efficace a le potentiel évident pour faire un polar tendu aux personnages denses et retords. Ce qui en est fait est affligeant : Cormac McCarthy (à moins que ce soit Ridley Scott, toujours prompte à répondre présent lorsqu'il s'agit de violer un script dantesque) écrit une longue descente aux Enfers que les protagonistes n'auront jamais déclenché. Soit il a carrément oublié toute dimension tragique de son récit puisque ce sera la faute à pas de chance si les protagonistes se font avoir, soit il n'a pas pensé qu'il fallait AU MOINS le talent de mise en scène des frères Coen pour réussir à rendre cette chute absurde et inexorable intéressante. Talent que Scott n'est pas même prêt d'approcher depuis deux décennies qu'il enquille les projets paresseusement mis en boite, les catastrophes industrieuses et les merdes sans nom qui ne s'en cachent pas.
Mais le pur "intérêt" de Cartel, ce sont ses dialogues ciselés par Cormac McCarthy, Ridley Scott ou un stagiaire nanarty et péteux se voulant un dialoguiste hors pair (encore une note d'intention sur la repompe du style des frères Coen). Il sera dans Cartel question de faire des monologues à peu prêt toutes les sept minutes montre en main pour expliciter les enjeux aux trois teubés du fond (à moins que ce soit pour donner l'impression d'enjeux), à base de thèmes universels tels le danger, la mort, l'amûre, la vulve collée sur un pare-brise qui ressemble à un poisson-chat.
Le tout est mené par des acteurs en roue libre, essayant tant bien que mal de sauver ces indigentes scènes à la vulgarité inconsciente (je crois que Fassbender ne parlait pas autant de cul dans Shame), livrant des performances par moment puissantes qui ne parviendront jamais à sauver le naufrage.
Au niveau de la réalisation, Ridley Scott a fait l'association Cormac McCarthy et No Country For Old Men et s'essaye au style des frères Coen en laissant au montage des séquences d'une inutilité rare (permettant notamment d'entrevoir l'excellent Dean Norris). Préférant filmer des dialogues que raconter une histoire, le film se retrouve sous une forme de gloubiboulga bavard à l'extrême, où aucun monologue ne parvient à faire mouche tant chacun brasse du vent à foison et atterrit dans la conversation comme un cheveu dans la soupe. Les rares séquences graphiques et cinématographiques sont filmées avec une platitude navrante, notamment parce qu'elles n'impliquent jamais le spectateur, puisque concernant l'intrigue du motard, totalement morcelée et ennuyante. On rajoute quelques effets "choc bourgeois" et cela achève de faire rentrer ce Cartel dans la catégorie des nanars prétentieux.