L'Hammer Noël n'est pas vraiment une ordure

Décidément la veine thriller de la Hammer a donné un paquet de petites perles. Cash on Demand est probablement l'une des toutes meilleures du lot, offrant une relecture audacieuse et inattendue du Christmas Carol de Dickens. Sauf qu'ici le conte surnaturel laisse place à un huis clos on ne peut plus terre à terre, dans lequel les fantômes sont remplacés par un braqueur d'un genre très particulier, sympathique, non violent, méticuleux et flegmatique. Même le simili-Scrooge interprété par Peter Cushing, s'il reprend certains traits du personnage original, propose quelque chose de bien plus subtil et touchant. Son apparente froideur va au fil du film se fissurer, révélant une grande vulnérabilité et créant une authentique empathie pour le protagoniste à mesure que le scénario déroule son implacable engrenage.

La sobriété de la réalisation, qui ne fait pas oublier qu'on est face à l'adaptation d'une pièce de théâtre (The Gold Inside de Jacques Gillies), contribue néanmoins à l'efficacité du film. Elle permet de rester concentré sur ce duel atypique, dont le rapport de force semble tellement déséquilibré qu'on finit par trembler au diapason des sueurs froides de Cushing face à un plan de braquage parfaitement huilé. A ce titre, la conclusion s'avère un poil décevante mais permet de boucler la boucle en adressant un clin d'oeil malin au Christmas Carol, et elle ne gâche de toutes façons en rien le plaisir pris face à ce suspense remarquablement ménagé. A peine pourra-t-on regretter la sous-exploitation de certains personnages secondaires, en particulier les personnages féminins. Mais quel régal d'interprétation offert par Andre Morell et Peter Cushing, ce dernier prouvant une fois pour toutes qu'il méritait bien plus que des rôles récurrents dans les Frankenstein et Dracula.