Vu au Grand Rex à sa sortie. Agé de 10 ans à cette époque, ce film m’avait marqué émotionnellement. Beaucoup d’affection pour ce personnage découvert d’abord à la télévision dans sa version animée. Le moins que l’on puisse dire c’est que tout le charme qui se dégageait dans ce personnage se retrouve dans cette version filmique d’une totale réussite. Vous êtes fans de manoir hanté ? Fans de ses longs couloirs où un spectre peut apparaitre à tout moment ? Vous voulez en plus de ça rigoler, vous amuser et avoir un tout petit peu peur ? Ce film est fait pour vous.
L’un des films qui a marqué notre enfance
On a tous grandit avec des films qui ont marqué notre enfance, nous on aidé involontairement à devenir ce que nous sommes aujourd’hui. Les studios Amblin et Steven Spielberg (agissant dans l’ombre) sont de retour avec un nouveau chef d’œuvre réalisé par Brad Silberling qui signera là son tout premier film (il travaillait avant sur des séries télé dont quelques épisodes de la série Alfred Hitchcock présente). Casper est à l’image d’E.T, l’extraterrestre. L’ami improbable que chaque petit garçon rêveur et solitaire rêve d’avoir. Pourtant Casper est un fantôme. Seulement c’est un gentil fantôme qui refuse de faire peur aux humains. La vie sur Terre est une vraie tristesse. Il ne veut qu’une chose : se faire des amis. Mais pas facile quand on est un fantôme et que l’on fait peur aux gens dès qu’ils croisent notre regard. Ce qui fait que notre fantôme qui vit sur Terre depuis plus de 50 ans, il est livré à lui-même, condamné à passer l’éternité seul (oui c’est triste, tenez, prenez ce mouchoir propre).
Pourtant, Casper, c’est LA gentillesse incarnée. Jamais en colère, aucune méchanceté, que de la bonté, de la générosité, de la serviabilité, très courtois, mais qu’est ce qu’il est maladroit (vous le verrez lors de sa première rencontre avec Kat). Il ne cherche qu’à faire le bien autour de lui. Vient s’ajouter dans ce film, trois éléments perturbateur dans la vie de ce gentil fantôme dont la vie n’a pas été tendre : ses trois oncles. Bouffi, Crado et Teigneux. Trois fantômes qui sont tout son contraire. Méchants, loufoques, plaisantins, infantiles, répugnants (surtout au petit déjeuner), ils se servent de la naïveté, de l’innocence et de la gentillesse de leur neveu pour en faire leur boniche. Casper c’est en gros Cendrillon version masculine.
Ce petit personnage basé sur un livre pour enfants, puis une bande dessinée publiée en 1939 par Harvey Comics, a eu droit par la suite à avoir son propre cartoon intitulé « Casper et ses amis » qui sera diffusé sur France 2 puis sur France 3 dans les Minikeums (ah nostalgie quand tu nous tiens !). C’est en 1995 que l’on décidera de lui faire son propre film. Cette fois, on modernise le personnage aux couleurs des années 90, et, tout comme ses oncles, il sera réalisé en image de synthèses avec une apparence semi-transparente. A l’image de Qui veut la peau de Roger Rabbit, Casper mélange à la fois prise de vue réelle et animation. C’est différent et à la fois similaire.
D’ailleurs les effets spéciaux sont justement signés par ILM (Star Wars, Indiana Jones, E.T, etc…), la société d’effets spéciaux créée par un certain George Lucas. On comprend mieux pourquoi l’esthétisme du film est si fabuleux, si inventif, si réaliste malgré son coté cartoonesque. A noter que des références autour du personnage de Casper, ce n’est pas ça qui manque. Par exemple le nom d’Harvey, porté par les personnages de Kat et son père fait référence à Harvey Comics, l’éditeur de la bande dessinée de Casper. Quand au thème musical, il fait lui-même référence au thème musical, la chanson toute mignonne attitrée au gentil fantôme. Elle a été retouchée mais tous les fans la reconnaitront.
Le tout premier film à voir son héros créé en image de synthèse
Les décors à la fois sombre, lugubre, gothique, avec ses murs de couleur pourpre, sa décoration (ses statues, son horloge en bois, ses lustres, son hall immense, ses longs escaliers, ses vieux tapis bordeaux), ses musiques, ça sent l’inspiration Tim Burtonesque tout en gardant sa propre identité. En effet, on s’éloigne du stéréotype de la maison hanté du style Victorien pour avoir cette fois une maison hantée à l’architecture Espagnole. Les décorateurs se sont inspiré des œuvres de l’architecte Antoni Gaudí . Résultat stupéfiant, impressionnant, gigantesque, bluffant de l’intérieur comme de l’extérieur. Un manoir hanté qui ne fait pas moins de 3 étages. On a la sensation de pouvoir courir, voler de manière fluide à travers ses couloirs et ses diverses pièces. Un lieu à la fois passionnant et effrayant. On pourrait y vivre.
La bande son, composée par James Horner est un pur bijou auditif. Oui, quand Casper ne vous fait pas verser une larme avec certains de ses dialogues, il vous fait verser une larme par ses musiques dignes d’un conte de fées. C’est tellement puissant, tellement parfait, tellement authentique. On vogue entre des balades en piano, des morceaux remplis de mélancolie (mention à la berceuse de Casper), d’autres mystérieux, d’autres plus horrifiques accompagnés par des chœurs et collant à l’ambiance fantomatique. Ca ferait presque parfois penser à ses vieux films d’horreurs des années 50. A cela, quelques chansons seront ajoutées dont la sublime (Remember Me This Way de Jordan Hill). A pleurer…encore…
Même si on ira faire un tour en début de film du coté d’un motel, d’un cabinet d’avocat ou par la suite du lycée de Kat, le lieu de l'intrigue se situera dans le manoir. Un huit clos certes mais dans une maison gigantesque renfermant de pièces secrètes. Pas de sensation désagréable de claustrophobie à prévoir. Les enfants y verront du divertissement, les adultes y verront quelque chose en plus : la complexité de l’histoire de ce film avec un homme qui souffre de la perte de sa femme, une adolescente qui vit très mal ses nombreux déménagements, un gentil fantôme qui souhaite par-dessus tout redevenir un petit garçon (si on y réfléchit bien, sa vie est un enfer, une vraie tragédie).
« Kat : C’est comment mourir ? Casper : C’est comme naitre, seulement
c’est à l’envers. Je me rappelle, je ne suis pas allé là où j’aurai du
allé, je suis resté un peu ici pour que mon père ne soit pas trop
seul. »
Tendresse, frayeur et tragédie
Casper a beau être un film qui s’adresse aux enfants, il est malgré cela bourré de références parodiques brillamment placées que seuls les adultes cinéphiles pourront reconnaitre. De belles surprises vous attendent avec même l’apparition de célébrités connues. On pourra même retrouver une connexion entre ce film et une franchise que beaucoup connaissent (chut, surprise). Comptez 8 ans d’âge minimum pour que votre (vos) enfant(s) regarde (nt) ce film.
Le visuel peut parfois faire peur avec cet environnement sombre, ses jeux avec l’éclairage, ses bruits étranges, ses toiles d’araignées, ses tableaux, ses bibelots, ses murs et ses fenêtres sales (elles sont très vitrage de cathédrales), son laboratoire de savant fou caché au sous sol du manoir pas très rassurant de l’extérieur et de l’intérieur, ses trois fantômes qui font peur avec leur rire, ce langage parfois vulgaire (très rare mais présent), le personnage de Carrigan prêt à tuer pour obtenir ce qui lui revient de droit (comme les trois fantômes prêt à tuer le père de Kat pour qu’il retrouve sa femme). Bien sur, on essayera de remanier, construire ces éléments terrifiants de manière à faire rire comme un bon vieux cartoon.
Les fantômes seront physiques comme dans cartoon mais avec ce petit coté réaliste grâce à leurs expressions familières du visage humain. Grosse mention à tous les acteurs physiques qui ont réussis à avoir des interactions avec quelqu’un qui n’existe pas. Pour le film Peter et Elliott le dragon par exemple, on remarque que les acteurs ne regardent pas vraiment au bon endroit lorsqu’ils sont en contact avec le dragon mais dans Casper, c’est tout le contraire. Pareil pour les interactions des personnages en image de synthèse avec de vrais objets. Les seuls effets spéciaux que vous trouverez dans ce film seront juste les fantômes et quelques plans du manoir en extérieur. Pour tout le reste, c’est du 100% décors naturels construits par toute une équipe pointilleuse et inspirée.
On a beau voir un Casper à l’apparence fantomatique, on ne sait pas qu’en fait, il fut autrefois un petit garçon (sa voix et son comportement naïf nous le confirme). Il sera intéressant d’en apprendre plus sur le passé de ce personnage adorable et attachant. Alors voila, Casper c’est de l’humour plutôt léger, des petites séquences en début de film pour vous faire frissonner sans vous effrayer, une vision romanesque de la mort (un peu comme le film Ghost) avec son au-delà et ses œuvres inachevées dans la vie passée du défunt. Mais il y a aussi beaucoup de messages, de thèmes permettant à l’enfant de développer, d’apprendre les vraies valeurs humaines :
• L’importance de ce faire des amis, l’importance des souvenirs,
• La difficulté de ce faire une place dans sa classe lorsqu’on est le petit nouveau (la petite nouvelle) de l’école,
• Le premier rendez-vous amoureux,
• Comment ce passe le quotidien d’un veuf qui élève seul son enfant,
• Apprendre à vivre malgré un décès,
• Ne pas juger, ne pas se moquer de ceux qu’on ne connait pas (Kat sera face à la pimbêche de sa classe qui se moquera d’elle),
• La cupidité (avec le personnage de Carrigan qui n’est intéressée que par l’argent et est prête à tout pour l’obtenir),
• Comprendre ce qu’est la mort et ce qu’il y a après (Casper ne se souvenant plus de qui il était avant de devenir un fantôme),
• Voir au-delà des apparences (Kat et son père seront au départ terrifiés par Casper et ses oncles).
Au final, Casper mériterait un tonnerre d’applaudissements envers toute l’équipe de son film. D’une tendresse tellement profonde, des répliques émouvantes, de l’humour léger bien trouvé, des acteurs très convaincants, des musiques et un esthétisme époustouflants, un Casper plein de vie et ultra expressif le rendant presque réel (il est déchirant lorsqu’il est triste). Malgré son thème pas très joyeux, cette œuvre est du pur feel good movie qui vous fera passer l’un des plus beaux moments de votre vie de cinéphile. Quelle tristesse quand tout se termine. Pourquoi ne fait-on plus de films de ce genre pour les enfants?!