Nick Marshall,publicitaire de Chicago dragueur et viril,est bien déconfit lorsqu'il apprend que la promotion qui lui était promise est finalement accordée à Darcy McGuire,un de ces êtres inférieurs qu'on appelle des femmes.Bien décidé à saboter le travail de la nouvelle venue afin de récupérer le job qu'il estime lui être dû,il a la surprise,après une électrocution,d'entendre ce que pensent les femmes,et ça va lui donner un avantage décisif dans tous les domaines de sa vie.Il est étonnant que ce petit bijou de comédie romantique soit l'oeuvre de Nancy Meyers,productrice et réalisatrice,qui n'a pas fait grand-chose de bon durant sa carrière,et des scénaristes Josh Goldsmith et Cathy Yuspa,à peu près inconnus et pas très actifs.Il faut croire que tout ce petit monde était en état de grâce au moment de concocter cette délicieuse romcom habilement articulée à un argument fantastique riche de potentialités parfaitement exploitées.Ce qu'on peut reprocher au film est son aspect vieillot,dû à cette image estampillée nineties dépourvue d'attrait,à la fois terne et sombre,et à l'utilisation d'une musique rétro déprimante truffée de tubes vintage,notamment du Frank Sinatra.A part ça,on a ici la preuve qu'on peut faire du féminisme intelligent au cinéma.Il ne s'agit pas de féminisme de combat car la rédemption de Nick,le bien nommé,ne passera pas par la contrainte et la punition,mais au contraire par la réussite.Au début il met à profit sans vergogne son don inespéré,confisquant systématiquement les bonnes idées de Darcy avec toujours un temps d'avance,glanant des infos sur les désirs féminins en fréquentant au maximum les filles,comblant au lit les désirs de sa maîtresse,devenant l'ami de ses collègues femmes qui le détestaient auparavant et recollant les morceaux avec sa fille ado dont il ne s'est jamais occupé.C'est magique,il sait invariablement ce que veut la gent féminine et ce qu'elle a envie d'entendre,ce qui fait de lui la coqueluche du gynécée environnant.Mais même les gros beaufs queutards peuvent éprouver des sentiments et Nick,à force d'explorer la psyché féminine,va de lui-même réaliser à quel point son comportement était condamnable et se mettre à évoluer vers plus de finesse et de compréhension,d'autant qu'il tombe amoureux de Darcy,celle qu'il voulait détruire et évincer.Il devient un autre homme et assume sa sensibilité enfouie sous une épaisse couche de misogynie,ce qui le fera renoncer à ses ambitions professionnelles mais lui permettra de trouver l'amour,l'estime de sa fille, de ses collègues et surtout de lui-même.Nancy Meyers déroule avec fluidité cette histoire traitée avec un humour décapant,beaucoup d'élégance et de jolis moments d'émotion,dus principalement à la romance entre Darcy et Nick,aux rapports de l'homme avec la vulnérable Lola et au sauvetage par le héros de la fragile Erin,l'employée invisible au bord du suicide.On peut même avoir une lecture plus pointue du script et considérer que cette faculté surnaturelle de capter les pensées n'existe pas,qu'elle réside uniquement dans la tête d'un personnage qui,parvenu au stade ultime du machisme,prend conscience de ses errements et du ratage qu'est sa vie.Mel Gibson,parangon de brutalité poilue,est l'acteur idéal pour incarner cet homme de Cro-Magnon à l'écoute de sa part féminine,d'autant qu'il sort une composition géniale,se livrant sans retenue et sans calcul.Helen Hunt est non seulement jolie mais elle sait en plus exprimer toute la beauté intérieure de l'adorable Darcy,un registre dans lequel la comédienne excelle.Alan Alda en patron pragmatique et faux-jeton et Mark Feuerstein en copain dubitatif sont très bons,mais la majorité du casting est composé de femmes,ce qui nous vaut un joli défilé d'actrices comprenant Judy Greer,bouleversante en petite employée désespérée,Marisa Tomei,craquante en serveuse romantique,Valerie Perrine en assistante de Nick,Lisa Edelstein en collègue agressive,Bette Midler en psy désarçonnée,Lauren Holly en ex cool et Ashley Johnson en adolescente mal dans sa peau.Au début du film on voit Nick enfant interprété par Logan Lerman,huit ans à l'époque,dont c'était la première apparition au cinéma.