César et Rosalie par Alligator
Je suis d'abord sorti du film avec une interrogation morale presque, une indéfinissable perplexité. Pourquoi ces personnages sont-ils ainsi ballotés dans leur indécision? J'ai eu du mal à les accepter tels quels. Enfin... indécis, seulement Rosalie (Romy Schneider) et David (Sami Frey), lequel m'a sauté à la mémoire (l'identification personnelle jouant à plein régime), pour le coup d'une manière tout à fait définissable, hurlante et finalement apaisée (mais toutefois pas autant que je l'aurais pensé).
David, commençons par lui, ne sait pas ce qu'il veut. Il est surtout incapable une fois assuré d'être aimé de construire quelque chose dans la durée dès que la compétition reprend, quand César repointe le bout de son nez, de la même manière qu'il avait laissé Rosalie à Antoine par le passé. Il ne tient pas la route. Ralenti défectueux.
En terme de flottement sentimental, Rosalie se pose là, l'irrésolue. De prime abord, ses sentiments semblent forts, suffisament pour ériger les barrières adéquates, bâtir sur le long terme une relation solide.
Mais elle semble en ayant choisi pour partenaire un aussi primaire César (Yves Montand) avoir pris option danger permanent. Le bonhomme est d'un abord rustre et violent, tempétueux, vociférant, cachant par sa volubilité et des arias extraverties une sensibilité et une dépendance affective très immature.
David a beau jeu de lui dire qu'il aime toujours Rosalie. Cette phrase déclenche un maelstrom destructeur dans le coeur et la tête de César qui s'en va de front concasser sa relation à coups de mensonges puérils et d'excès de violence grossière.
Bien évidemment, le film ne pouvait s'en tenir à cela : il est signé Dabadie et Sautet. Claude Néron figure à l'écriture mais je ne connais pas. Les deux premiers sont de même reconnaissables finesse et compassion pour leurs personnages. Alors César, David et Rosalie continuent le film et évoluent dans un monde où les défauts sont vaillamment combattus, où après la colère et la tristesse, vient le temps des efforts pour comprendre et accepter l'autre. Malgré tout. Délicatesse et humanité. Surtout les thèmes précisément abordés par ce film sont l'engagement, la dépendance ou la liberté, l'immaturité de la passion.
Je ne sais dans quelle mesure la fin peut être considérée comme un happy-end. Je ne sais non plus si l'histoire nous montre réellement la tentative laborieuse et pleine d'espoir d'une sorte de ménage à trois. Je ne sais encore dans quelle proportion le film hérite de l'histoire réelle, romancée ou fidèle, de Claude Sautet et d'Alexandre Jardin. Quoiqu'il en soit, ce qui importe avant tout, c'est la douceur et l'empressement déployé par les personnages à essayer coûte que coûte de s'accepter. Peut-être même au delà de ce à quoi ils pouvaient s'attendre au départ. Par exemple, l'histoire d'amitié entre César et David est aussi touchante que troublante. Aussi trouble que le regard perdu mais souriant de Rosalie sur le dernier plan du film.
Je suis peut-être un poil déçu par la performance de Sami Frey que j'ai trouvé quelque peu impassible. L'exubérance de Montand émane de son personnage et la suite montre bien son talent à changer de tonalité pour bien incarner ce personnage difficile, simple d'aspect mais difficile en réalité à cause de la confusion et le bouleversement qui le submergent brutalement. C'est toujours ardu de jouer le con sans en faire des tonnes. Schneider révèle ce même trait, cette confusion, en y ajoutant cette charge à devoir choisir, à devoir contrôler ses deux amours, jusqu'au trop plein.