En 1982, Wim Wenders profite du festival de cannes pour convier quelques réalisateurs dans une pièce afin de répondre à la question suivante : avec le développement de la télévision, le cinéma est-il en train de mourir ? Seule dans la pièce, chaque personnalité conviée s'exprime librement, plus ou moins longuement sur le sujet et c'est à mon sens très intéressant (même si on est parfois frustré quand les invités dégagent en touche).
Godard, ébouriffé, cigare au bec, commence en faisant un historique amusant du cinéma en comparaison à d'autres formes d'Art, Spielberg évoque ensuite les coûts de production galopants suite à la dépréciation des monnaies, Monte Hellman, lui, avoue ne plus jamais aller au cinéma (ou très rarement) parce qu'il y est souvent déçu par ce qu'il voit, et surtout Antonioni, tout en classe, force tranquille, se lance dans une réflexion philosophique très lucide sur l'état du cinéma en cette année 1982, pas du tout pessimiste, mais assurément pertinente.
Alors la forme du docu est peu passionnante, minimaliste, simple contexte à classer les propos mais je trouve qu'un tel objet filmique, en à peine 45 minutes, est très riche d'enseignements.
D'abord il est rare de voir les cinéastes parler de la sorte de leur métier (Spielberg qui dit qu'il ne peut qu'espérer que le cinoche continue d'exister parce qu'il ne sait rien faire d'autre que des films c'est amusant :D ) et surtout ça permet de voir que finalement on a plus ou moins le même discours aujourd'hui, et pourtant bon nombre des craintes que les différents cinéastes exposent dans le docu se sont vérifiées jusqu'à aujourd'hui (notamment leur crainte que la télé prenne de plus en plus de place, Antonioni anticipant même le home cinema GIGAULTRAHAUTEDEF qui compose bon nombre de nos salons d'aujourd'hui, héhé).
J'ai maté le docu parce que j'ai vu que, l'année dernière, Lubna Playoust avait refait la même expérience en reposant la question à d'autres cinéastes, 40 ans plus tard. Inutile de préciser que j'ai bien envie de découvrir ce qu'ils ont bien pu dire à notre époque où la VOD fait sa loi mais où le cinéma a toujours, pour le moment, son mot à dire.