Peremena uasti, le film de la cinéaste Russe K Mouratova, sorti en 1987, est inspiré de la nouvelle, The Letter, du Britannique Somerset Maugham, mais le cadre et le rythme narratif sont totalement déconstruits, par Mouratova, en artiste novatrice, anti conformiste, et honteusement censurée dans l’USRSS de l’après dégel.
L’histoire banale, démarre dans une serre luxuriante, que ne renierait pas le douanier Rousseau, une femme du monde, compassée qu’un homme titille, se voyant suspectée, puis inculpée de l’avoir finalement tué, sera engôlée.
Les péripéties d’une enquête loufoque vont exploser cette intrigue de prime abord bien ordinaire, dans une suite de jeux de répétitions, de décadrages et de ruptures. La caméra de Mouratova joue et dilate les murs et alcôves de la prison jusqu’à la métaphore, fait éclore un ensemble d’individus, logorrhéiques, hilares ou libidineux, qui empruntent aux comiques du cirque ou de l’humour noir, pour mieux distiller des relents nauséeux de carcéralité soviétique. L’enfermement est chromatique ou spectral, bruyant ou musical. Les dialogues rarement châtiés convoquent l’absurde ou le folklore local, qu’acteurs et non acteurs, scandent avec un lyrisme doux amer. La fin est impressionnante avec ce cheval dans la steppe (je n’en dis pas plus)…
A découvrir tout autant que Brèves rencontres son premier long métrage qui a déclenché l’ire des commissaires du peuple.