C'est assurément dans le sillage d'Hitchcock que s'est faufilé Stanley Donen, et la présence de Cary Grant n'est pas fortuite, rappelant les personnages de la Mort aux trousses et la Main au collet. Donen mélange avec brio une intrigue policière à suspense à une comédie romantique dont le décor est celui du Paris qu'aiment y voir les Américains ; il nous envoie la totale : diner aux chandelles sur un bateau-mouche, ballade sur les quais de Seine, plans de la Tour Eiffel, scènes dans le métro, petits bistrots typés, marché aux timbres etc... Il filme Paris d'une façon amoureuse et avec sensibilité, mais surtout, il y a ce couple magique que forment Audrey Hepburn à la frimousse toujours rayonnante, et Cary Grant, avec ce charme inimitable du quinquagénaire élégant.
Charme et humour s'opposent à la brutalité de 3 loustics inquiétants incarnés par James Coburn, George Kennedy et Ned Glass... on peut ajouter un quatrième larron avec le personnage de Walter Matthau. A signaler aussi le personnage rigolo de l'inspecteur joué par Jacques Marin. Tous ces individus courent après un magot, mais après tout, l'intrigue n'a pas tellement d'importance, et on ne croit guère à cette histoire de voleurs volés tant on se laisse bercer par les aventures parisiennes de Cary et Audrey dans un divertissement pétillant et malicieux orchestré par le réalisateur qui réussit pas mal de clins d'oeil à Hitchcock et même à Un Américain à Paris. C'est Hitchcock qui avait baptisé "McGuffin" tout ce qui était censé faire courir les personnages, et ici le "McGuffin" c'est ce fichu magot.
La comédie policière est un genre difficile où justement Hitchcock a bien réussi, et Donen s'y frotte avec brio puisqu'il peut passer sans encombre d'une bagarre sur les toits à une roucoulade en bateau-mouche, en jouant en orfèvre du mensonge et de l'illusion. Tout est chouette dans Charade, même le générique très multicolore de Maurice Binder (à qui l'on doit des génériques de folie, dont ceux des James Bond), sans oublier la musique romantique de Henry Mancini. Tout y est gracieux et sophistiqué, même si en le revoyant, je garde finalement une note relativement bonne mais nuancée, due à quelques légers flottements, mais rien de grave, c'est presque un régal.