Le pitch est on ne peut plus classique: un homme sans repères éreinté de son insignifiante vie, décide de tout plaquer pour aller vivre dans les bois. L'introduction n'est pas inconnue à l'amateur du cinéma de Kurosawa (celui-ci, pas l'autre). Un mélange de thriller et de fantastique, dans laquelle on voit un inspecteur de police perdre progressivement pied avec le monde. Le premier contact avec la forêt poursuit dans cette direction, montrant cet espace davantage comme un lieu hanté, où se réunissent les tourments humains et où gravitent d'étranges intrigues liées à un étrange arbre supposément toxique, le Charisma.
Passé cette découverte, le film devient le contrepied de ce qu'il installait jusque-là, sans pour autant perdre en cohérence. Notre inspecteur se transforme progressivement en ermite, affinant sa vision du monde au contact de cette communauté sylvestre chaotique. L'arbre est tour à tour la raison de vivre de certains au travers d'une mystique dévoyée, un sujet d'étude biologique ou source de profit pour une bande grotesque de trafiquants de drogues, grotesque qui prédomine au fil du récit. En cela, Charisma est un film moderne, par son cynisme nihiliste, lucide sans pessimisme, acceptant la chute des fausses idoles et le chaos du monde, dans lequel notre inspecteur décide finalement de retourner.