Je suis Charlie
Quel mec n'a pas rêvé d'avoir à 40 ans deux petites nénettes de 20
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le 8 févr. 2016
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- Vous avez des diplômes .
- Non.
- Même pas le certificat d'études ?
- Bein non. Pourquoi ? J'ai besoin de diplômes pour transporter des caisses de coca ?
- Un diplôme cela n'a jamais fait de mal à personne.
- Bein chui navré, j'en ai pas. Vous voulez savoir où j'étais le jour de mon certificat ? J'étais à la pêche avec un pote. Et le jour du brevet j'ai était voir un film de cul.
- Vous avez une carte d'identité ?
- Ouais. Voilà.
- Elle est périmée.
- Bein oui, et alors ?
- Il faut la faire refaire, ou revenir avec un passeport.
- Ça va pas non, vous voyez bien que c'est moi sur la photo. Puis, c'est bien suffisant pour remplir votre fiche.
- Vous êtes célibataire ? Marié ?
- Célibataire.
- Vous êtes célibataire et vous porté une alliance.
- Ouais, je suis célibataire, je porte une alliance, et je vous emmerde. Cela vous suffit ça ?
Joël Séria présente avec "Charlie et ses deux nénettes" son deuxième long-métrage. Une oeuvre prônant une liberté de vie formidable, avec un fond libertin, et antisocial qui fait du bien, accompagné par une tonalité de drôlerie, de douceur et de réalisme rendant le tout délicieusement jubilatoire et attractif.
Tout d'abord, si vous n'êtes pas suffisamment ouvert d'esprit et que cela vous pose un problème de voir un homme avec la quarantaine passé avoir des relations avec des filles d'à peine 20 ans, ou vice-versa, alors ce film n'est clairement pas fait pour vous. Personnellement, je prône une liberté totale sur ce point. Qu'une femme de cinquante ans sorte avec un jeune de 20 ans, ou bien l'inverse ne m'a jamais posé de problèmes. À partir du moment où on est majeur et que chacun agit librement et avec consentement, je ne vois pas où est le problème. Surtout, au nom de quoi je viendrai imposer mon avis. Comme on dit si bien par chez moi : "à chacun son cul".
Pourquoi tant de familiarité de ma part ?
C'est simplement pour faire écho avec le réalisateur Joël Séria, qui à travers Charlie et ses deux nénettes se libère d'année de frustration, lui qui durant toute son enfance à eu une éducation catholique très stricte. Jusqu'à suivre durant 10 années de sa vie un enseignement auprès des prêtres enseignant avec obligation de messes et de confession, chose dont le cinéaste souffrira grandement et qui lui vaudra finalement toute sa filmographie, avec des oeuvres anticonformistes servant d'exorcisme et d'exutoire à toute cette frustration accumulée. Ajoutons à cela que Séria durant ses premières années de cinéma n'avait pas d'argent et devait pour survivre faire le vendeur dans les marchés. À partir de là, tout devient plus clair ! Le récit devient beaucoup plus limpide dans sa construction, très subtil et nuancé dans ses dialogues. On comprend d'où vient cette ivresse de liberté et de je m'en foutisme émanant des personnages. Charlie et ses deux nénettes c'est le reflet rêveur d'un homme qui à mélanger sa vie personnelle avec ses propres fantasmes de liberté et de jouissance.
Une liberté de pensée qui se retrouve dans les conversations de bar, mais également dans la façon dont le cinéaste traite le récit et refuse les règles, mais sans une once de méchanceté ni de haine. On assiste donc à un règlement de comptes des mœurs, transposé dans un long-métrage par le biais de personnages dits libertins autant dans leurs têtes que dans les faits. Une intrigue irrévérencieuse des années 70 qui va à la rencontre du petit peuple via les nombreuses provinces visitées, et les nombreux personnages rencontrer. Un art de vivre à la française, sur la route des marchés, dans un esprit voltairien via un langage cru qui virevolte avec les rencontres impromptues. Riche en finesse à travers une conduite intimiste, avec un réalisme et naturalisme rendant cette liberté désabusée et non simplette.
Une vision atmosphérique amenant une certaine profondeur à cette mélancolie émerveillée par un esprit libertaire qui traite avec ravissement et inspiration une vie de nomade, loin de tout, fantasmée de la part du cinéaste qui pose un regard tendre, amical et amoureux à ce périple. Une posture antisociale et apolitique à la bonne franquette, qui n'est pas là pour faire un boum politique, mais un simple coup de gueule de la part d'un rêveur qui avec naïveté, liberté, dénaturé et détermination, prend sa revanche contre un conformisme étouffant. Certes, techniquement ce n'est pas très innovateur, mais on peut compter sur une petite compostion agréable à l'oreille signée Philippe Sarde. L'esprit du récit lui est une réussite totale, avec des personnages incroyablement intéressants, incarnée par des comédiens au top qui transpire habilement une époque aujourd'hui révolue.
Charlie Moret (Serge Sauvion) est un personnage formidable. Un quarantenaire chômeur et sans attaches, formé à l'art de la débrouille, franc du collier, honnête et bienveillant. J'adore la relation qu'il entretient avec les deux nénettes, dont il aurait pu profiter pleinement vu leur jeune âge, mais ce n'est pas la manière de procéder du bougre qui du début à la fin (malgré quelques partis de jambes en l'air) restera très correct, protecteur et prévenant avec elles. Je pensais qu'il aurait été jaloux, ou ravager de devoir quitter les filles, ou de les entendre parler de beaux hommes plus jeunes, mais sa maturité et son esprit libre en fond un type épatant qui profite de l'instant présent et n'impose jamais ses choix aux autres. J'aurais adoré être ce gars.
Les deux nénettes, Guislaine (Jeanne Goupil) et sa cousine Josiane (Anne Libert), sont des fillettes de 20 ans pleins de vie, débrouillardes, volontaires, qui aiment rire et profiter de la vie sans pour autant être dénuée de responsabilité. Elles sont belles, malines et intelligentes (même si dans un premier temps on les pense un peu gourdes). Auprès de Charlie elles vont découvrir un autre art de vivre : une vie libertine, nomade et optimiste dans lequel le triangle amoureux se crée une bulle infranchissable contre le monde réel gravitant autour d'eux. Enfin le second rôle "Tony" incarné par Jean-Pierre Marielle avec son arnaque de la cathédrale de Chartres est un vrai régal, surtout qu'à travers ce personnage Séria se moque de la véracité des préceptes religieux.
Je terminerais par les nombreuses scènes marquantes avec des situations cocasses dont nous régale Joël Séria et qui ont faits tout du long mon bonheur. Des petits moments simples de la vie diffusée avec une liberté qui fait plaisir à voir. Entre la séquence de la rencontre, celle du premier marché, la fête foraine, le bal endiablé, le premier plan à 3, les arnaques de Marielle, les nombreux repas au restaurant... on se régale. Le meilleur reste tout de même lors de la séquence finale avec les retrouvailles, et le regard très complice et communicatif entre Charlie et Guislaine qui vient de retrouver Josiane. Une scène finale édifiante qui m'a transmis instantanément le tonus et le sourire. À ce moment-là, le seul et véritable défaut du film est de se terminer.
CONCLUSION :
Joël Séria réussit magnifiquement avec "Charlie et ses deux nénettes" à exorciser ses vieux démons et à trouver cette liberté de vivre qui lui a fait trop longtemps défaut. Un travail remarquable appuyé par un excellent casting qui réussit à donner pleinement vie à leurs personnages avec un jeu de regard et de sourire saisissant. Une belle revanche de la part d'un cinéaste visiblement inspiré. Il est clair qu'aujourd'hui un tel film ne pourrait voir le jour sans subir le mécontentement des associations féministes et autres... c'est ce qui en fait une oeuvre authentique et assurément culte, à ne pas confondre avec un film de comédie.
Avec cette oeuvre on profite pleinement de cet instant de vie, sans chaîne, ni peur du regard de l'autre.
- Tient le voilà.
- Qui ça ?
- Le placier. Attendez-moi là et soyez sage.
- Qu'est-ce qu'il est sympa ce type.
- Pourquoi il fait ça ? Tu crois qu'il a l'intention de nous draguer ?
- Oh non, on est bien trop jeune pour lui.
- Alors pourquoi il fait ça ?
- Je sais pas. Parce qu'il s'ennuie et qu'on le fait rigoler.
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Créée
le 9 sept. 2020
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