Quand je critique des films historiques, je dis tout de suite que je ne suis pas assez savant pour juger de leur exactitude historique. D'ailleurs, peu importe, c'est un film avant tout. Chouans! est une perle dans le cinéma français historique, car servi par une belle brochette d'acteurs qui forment une ménagerie qui marche.
Le scénario, avec pour fond la résistance des Chouans à la Révolution française, est aussi une intrigue très intéressante. Pourquoi certains ont résisté à l'appel de la République ? Peut-être parce que l'attitude des Révolutionnaires étaient tout aussi exécrable que ceux qu'ils essayaient d'annihiler (cf l'excellent Quatrevingt-treize du père Hugo). Ou comment pour certains la fin justifie les moyens, à n'importe quel prix. Ce que le film communique, c'est que les grands idéaux des hommes se traduisent souvent en drames humains. Il faut rappeler qu'on est en 1988, à un an du bicentenaire de la Révolution, et que la tendance historiographique de l'époque, sous l'influence principale de François Furet, est plutôt antijacobine et antimarxiste (à la différence du chef d'œuvre absolu sur la Révolution, La Marseillaise de Renoir, ode au Front Populaire ; ou encore du récent Un peuple et son roi, pas mauvais du tout [lire ma critique]). Mais Chouans n'en rajoute heureusement pas dans la propagande, le fond politique étant surtout là pour dramatiser les relations des protagonistes.
On a le noble Savinien de Kerfadec (joué par Noiret), pour qui choisir son camp importe peu, il a d'autres idéaux en tête : la science (quoique politiquement, le parti de la science et du droit positif, c'est bien celui des Révolutionnaires). Il y a le gentil Chouans, tout frais venu d'Amérique, qui a choisi son camp royaliste sur un coup de tête, et son rival éternel à la tête des Révolutionnaires. Entre les deux se tient Sophie Marceau, pour qui peu importe les idéaux, seul le cœur des hommes a de l'importance à ses yeux.
C'est en tous cas très bien agencé, et mérite d'être vu, soit pour son intérêt historique relatif, soit pour la fable humaine qui est brodée là-dessus. Il y a un souffle épique évident, accompagné d'une tragi-comédie franchouillarde très plaisante, avec des dialogues ciselés.